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« I ♥ Paris » : un signe disponible dans le commerce touristique

droit des marques decheance des droits


A propos de Cass. Com., 6 janvier 2015, Pourvoi n°13-17108

La Cour de Cassation vient de confirmer la nullité de l’enregistrement des marques françaises « I ♥ Paris » et « j’♥ Paris » déposées en 1991 et en 2007 par un particulier dans le but de monopoliser l’utilisation desdits signes et de tout dérivé (I ♥ Versailles, Paris Je t’♥…) dans le commerce très juteux des objets de souvenir touristique.

Effectivement qui n’a pas vu au moins une fois apparaître sur des articles de souvenirs, t-shirts, porte-clés et autres bibelots, la marque « I ♥ Paris » ou « j’♥ Paris » ?

Agacé de se voir opposer systématiquement ses droits antérieurs sur les marques « I ♥ Paris » et « j’♥ Paris », un concurrent a fini par saisir le Tribunal de Grande Instance de Paris aux fins que celui-ci prononce la nullité des dites marques pour défaut de caractère distinctif.

La Cour de cassation a approuvé le raisonnement du Tribunal de grande instance et de la Cour d’appel en considérant que les marques litigieuses étaient dépourvues de caractère distinctif.

En effet, une des conditions de validité d’une marque est qu’elle doit être distinctive eu égard aux produits et services qu’elle désigne. En droit français, cette condition ressort des articles L. 711-1 et L. 711-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Au-delà des cas listés par l’article 711-2 du Code de propriété intellectuelle de signes dépourvus de caractère distinctif (désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service dans le langage courant ou professionnel ; forme imposée par la nature ou la fonction du produit ; signes pouvant servir à désigner une caractéristique du produit), l’article L.711-1 définit la marque comme « un signe (…) servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale » de ceux proposés par la concurrence.

Ainsi, la marque doit jouer son rôle premier qui est de garantir au consommateur (et plus généralement au public auquel elle s’adresse) l’origine des produits et services proposés sous cette marque.

En d’autres termes, lorsque le consommateur perçoit le signe, le consommateur doit percevoir celui-ci comme une marque attachée aux produits ou services d’une entreprise déterminée et non comme un signe décoratif ou une expression couramment usitée dans tel ou tel secteur d’activité ou de manière plus globale (on pense ici à l’annonce faite par l’INPI de refuser à l’enregistrement le slogan « Je Suis Charlie » à titre de marque du fait de sa large utilisation par la collectivité).

En l’espèce, la Cour de cassation approuve le raisonnement par les juges du fond qui ont jugé qu’eu égard au public pertinent, à savoir « les touristes d’attention moyenne en quête de l’achat de souvenirs afin de conserver une trace de leur passage à Paris » (sic), les marques en cause véhiculent un message d’attachement à une ville particulière, ce qui conduira les touristes à les percevoir comme des signes décoratifs dont ils comprennent le sens (et ce quelle que soit leur nationalité), et non comme des marques leur garantissant que les produits qu’ils achètent seraient fabriqués et commercialisés par le titulaire desdites marques ou son licencié.

Cet arrêt mérite à notre sens d’être salué, tout comme la décision prise par l’INPI de refuser l’enregistrement de la marque JE SUIS CHARLIE par des personnes avides de s’approprier indûment le monopole de signes dans la vie des affaires, alors qu’il n’ont pas de légitimité pour ce faire.

En effet, le droit des marques ne doit pas être détourné de sa fonction première de garantie d’origine de produits ou de services pour être un frein à la liberté d’expression et à la liberté du commerce.

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