01 56 43 68 80

6, rue de Saint-Petersbourg, 75008 Paris

Dépôt de marque : obligatoire pour ne pas se faire doubler !

jeux video

Dans cette affaire, une société annonce, via un communiqué de presse, le lancement d’un programme de prévention de l’addiction au jeu mettant notamment en œuvre une plate-forme destinée aux opérateurs de jeu en ligne ; programme baptisé Player Care.

Dans les trois-quatre jours après ce communiqué de presse, une société concurrente, se présentant comme le n°1 dans la lutte contre l’addiction au jeu en France, réserve alors toute une série de noms de domaine déclinés autour des dénominations « playercare » et « player-care » et dépose une marque verbale française Player Care pour désigner divers services relevant des classes 36, 38, 41, 42, 44 et 45 parmi lesquels figurent en particulier des services d’écoute et d’aide psychologique dans les domaines de la dépendance et de l’excès au jeu.

Voyant dans ces actions une fraude manifeste à ses droits, la société qui vient d’annoncer le lancement de son programme met en demeure cette société puis l’assigne devant le TGI de Paris aux fins de voir déclarer frauduleux les dépôts de marque et acquisitions de noms de domaine Player Care et Playercare et d’obtenir le retrait de la marque Player Care ainsi que le transfert à son bénéfice de tout nom de domaine incluant les termes Player Care.

Toutefois, les juges du fond n’ont pas la même vision du litige et la déboutent en conséquence de l’ensemble de ses demandes.

Bien entendu, la société « lésée » ne s’en laisse pas conter et interjette appel du jugement de première instance.

En effet, elle estime que le dépôt de la marque litigieuse et les réservations des noms de domaine litigieux par un concurrent direct quelques jours après l’annonce massive du lancement de son programme Player Care dans la presse ne sauraient relever d’un pur hasard, mais attestent au contraire de la volonté de son concurrent d’entraver l’entrée sur le marché d’un nouvel opérateur en le privant d’un signe nécessaire à l’exercice de son activité.

Ce concurrent s’en défend en faisant valoir qu’il travaille lui-même depuis plusieurs années à la mise en place d’un portail baptisé Player Care visant les mêmes objectifs ; projet pour lequel elle aurait investi plusieurs centaines de milliers d’euros.

C’est dans ce contexte factuel que la Cour devait se prononcer sur la validité du dépôt de la marque Player Care, au visa de l’article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle qui énonce que « si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice » et plus généralement en se fondant sur l’adage « fraus omnia corrompit » selon lequel la fraude corrompt tout.

La preuve de la fraude toujours difficile à rapporter

La Cour d’appel, rappelant que la fraude ne se présume pas rappelle que la charge de la preuve de cette fraude incombe par voie de conséquence à celui qui l’invoque.

Or, elle considère qu’en l’espèce, mis à part l’annonce du lancement d’un programme Player Care dans la presse, la société qui invoque le dépôt frauduleux n’apporte aucun élément de nature à prouver un quelconque investissement lié à ce programme annoncé ni aucune pièce démontrant que ledit programme était effectivement sur le point d’être mis en service.

La Cour approuve donc la décision des premiers juges en ce qu’ils ont conclu que « la fraude n’est pas caractérisée par la société qui se borne en définitive à souligner que le dépôt de la marque a suivi de près l’annonce de presse, or, la seule chronologie des faits ne saurait être retenue, à défaut d’être étayée par tout autre élément, comme constituant la preuve de la fraude invoquée » (sic).

Conclusion : le dépôt de la marque préalablement à la divulgation du nom au public est essentiel

Cette affaire illustre toute la difficulté à rapporter la preuve devant les tribunaux de la fraude invoquée dans des actions en annulation ou en revendication de marques déposées frauduleusement au sens de l’article L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle.

Dès lors, tout porteur de projet entrepreneur, créateur d’entreprise, e-commerçant ne doit avoir qu’un seul réflexe pour protéger le nom de son nouveau service ou de son nouveau produit : le déposer à titre de marque avant son annonce au grand public ou sa divulgation à des tiers…

A défaut, il prend le risque qu’un concurrent ou qu’un tiers ne se charge de le faire à sa place

A propos de CA Paris, 26 septembre 2012, RG n°10/22304

ENVELOPPE NEWSLETTER copie

L'actu juridique numérique
du mardi matin.

Inscrivez-vous pour recevoir nos derniers articles, podcasts, vidéos et invitations aux webinars juridiques.

*Champs requis. Le cabinet HAAS Avocats traite votre adresse e-mail pour vous envoyer ses newsletters.

Vous pouvez accéder aux données vous concernant, les rectifier, demander leur effacement ou exercer votre droit à la limitation du traitement de vos données en nous contact à l’adresse mail suivante : dpo@haas-avocats.com