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Analyse comparative des effets de la saisie conservatoire pratiquée avant sauvegarde et avant redressement judiciaire

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Article du Cabinet D&A RESTRUCTURING

Avocats spécialisés dans le restructuring

Introduction :

Les saisies conservatoires réglementées par les articles 67 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 sont soumises à la règle des procédures collectives, c’est-à-dire l’arrêt ou l’interdiction des voies d’exécution.

Certains auteurs évoquent la notion de neutralisation des voies d’exécution par les procédures collectives.

La jurisprudence a permis de faire disparaitre les effets de la saisie conservatoire en matière de redressement et liquidation judicaire.

En revanche, en matière de sauvegarde, les effets de cette dernière sur la saisie conservatoire pratiquée avant la procédure participent d’un vide juridique.

I – La disparition des effets de la saisie conservatoire de créances non convertie en saisie attribution avant l’ouverture d’une procédure de redressement ou liquidation judiciaire :

Lorsqu’un créancier détient une créance paraissant fondée en son principe et de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement mais ne dispose pas de titre exécutoire à l’encontre d’un débiteur, l’article 67 de la loi n° 91-659 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution peut se voir autoriser par le Juge à pratiquer une saisie conservatoire de créance.

Cette saisie conservatoire ne confère pas attribution des sommes saisies au créancier mais a pour effet de rendre indisponibles et de consigner les sommes saisies.

L’obtention d’un titre doit être initiée dans les 30 jours afin de convertir à terme la procédure de saisie conservatoire en saisie attribution.

L’obtention de ce titre est fondamentale dès lors que la saisie conservatoire confrontée à une procédure de redressement ou liquidation judiciaire est en réalité aussi fragile qu’un verre de cristal.

En effet, l’ouverture de la procédure de redressement ou liquidation judiciaire rend impossible toute conversion de la saisie conservatoire du fait du principe de l’arrêt des poursuites individuelles.

Dès lors si l’acte de conversion en saisie attribution n’a pas été effectué au jour du jugement d’ouverture, peut-elle être effectuée après le jugement d’ouverture c’est-à-dire que la question se pose de savoir s’il subsiste des effets qui étaient les siens avant le jugement d’ouverture ?

Cette question a animé tant la doctrine, que la jurisprudence, certains auteurs ayant considéré qu’un droit régulièrement acquis avant la procédure devait être maintenu alors que d’autres considéraient que la règle de la qualité des créanciers devait prédominer.

Un arrêt de référence de la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation du 22 avril 1997 a définitivement tranché ce point en jugeant que la saisie conservatoire qui n’avait pas été convertie en saisie attribution à la date du jugement d’ouverture du saisi ne pouvait plus produire ses effets après ledit jugement de redressement ou liquidation judiciaire.

Cette solution est donc tombée comme un couperet et a consacré les effets exorbitants de droit commun de la procédure collective.

Ces solutions initiées sous l’empire de l’ancienne législation sont transposables à la loi de sauvegarde du 26 juillet 2005 en matière de redressement et liquidation judiciaire.

Dès lors, dans la droite lignée de cette jurisprudence, il existe de nombreux arrêts postérieurs qui ordonnent la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée même avant la cessation de paiement et non convertie à la date du jugement d’ouverture de redressement et liquidation judiciaire.

Il n’en est pas de même en matière de procédure de sauvegarde.

II – Le sort oublié de la saisie conservatoire pratiquée avant une procédure de sauvegarde et non convertie en saisie attribution : 

Autant la situation est parfaitement claire puisqu’une procédure de redressement ou liquidation judiciaire va permettre d’ordonner la mainlevée d’une saisie conservatoire pratiquée avant redressement judiciaire et non convertie en saisie attribution à la date du jugement d’ouverture de cette procédure ainsi que l’a consacré la jurisprudence.

Cette règle qui emporte la conséquence d’obliger le créancier à donner mainlevée de la saisie conservatoire de créance joue à l’identique en matière de saisie conservatoire préalable à une saisie vente ou à une saisie appréhension ou bien encore à une saisie revendication en matière de redressement ou liquidation judiciaire.

Il en est de même d’une saisie conservatoire pratiquée en période suspecte dès lors qu’elle n’a pas été convertie en saisie attribution.

En revanche, lorsqu’une saisie conservatoire de créance est pratiquée par un créancier antérieurement à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde et que celle-ci n’a pas été convertie avant cette procédure en saisie attribution, la jurisprudence ne semble pas encore avoir réglé ce cas de figure et il existe en pareille situation une espèce de « no man’s land ».

On pourrait considérer d’une part qu’un droit régulièrement acquis par une saisie conservatoire avant l’ouverture d’une procédure de sauvegarde devrait être maintenu alors qu’à l’inverse l’on pourrait considérer se fonder sur la règle de l’égalité des créanciers devant la procédure.

En tout état de cause, et jusqu’à ce jour la jurisprudence n’a pas tranché cette difficulté en jugeant que le créancier devrait donner mainlevée d’une saisie conservatoire pratiquée avant l’ouverture d’une procédure de sauvegarde et non convertie à la date de l’ouverture de cette dernière procédure.

C’est la raison pour laquelle, en présence de difficultés, et dès lors que les sommes bloquées par la saisie conservatoire pourraient apparaitre comme « perdues par tout le monde » c’est-à-dire pour le créancier qui ne peut convertir sa saisie conservatoire en saisie attribution du fait de l’arrêt des poursuites individuelles propres à la procédure de sauvegarde mais non plus au débiteur qui ne peut s’appuyer sur une jurisprudence ordonnant la mainlevée de la saisie conservatoire, les deux parties auraient intérêt à s’asseoir autour d’une table pour négocier et envisager que contre mainlevée de la saisie conservatoire donnée par le créancier les parties pourraient partager cette somme à parité ou pas.

Telle est la question à laquelle sont confrontés les praticiens.

Conclusion:

En matière d’application de la règle de l’arrêt des voies d’exécution aux saisies conservatoires ainsi qu’il a été indiqué précédemment, la doctrine et la jurisprudence sont désormais unanimes pour conclure à la disparition des effets de la saisie conservatoire de créances non converties en saisie attribution avant l’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire.

En revanche, dans le même cas de figure pour une procédure de sauvegarde, la situation n’est pas réglée à ce jour en jurisprudence et il convient de privilégier à ce stade la négociation entre les parties.

C’est l’application de l’adage « Une mauvaise négociation vaut mieux qu’un bon procès ».

En revanche, tout dépendra du montant puisque comme le disait le milliardaire Jean-Paul GETTY :

« Si vous devez 100 dollars à la Banque, c’est votre problème, si vous devez 100.000.000 de dollars à la Banque c’est le problème de la Banque ».

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