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Carte de crédit : la composition du code confidentiel ne présume pas une faute lourde du titulaire de la carte perdue ou volée

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Le bon sens exigerait que le titulaire d’une carte soit normalement présumé être l’auteur des opérations réalisées antérieurement à l’opposition.

Toutefois, la prise de conscience d’une perte ou d’un vol n’est pas nécessairement immédiate. Aussi  l’article L. 132-3 du code monétaire dispose, que le porteur d’une carte perdue ou volée ne supporte la perte subie avant l’opposition qu’à concurrence d’un plafond qui ne peut dépasser 150 euros. Exceptionnellement, il ne sera pas appliqué en cas de négligence du porteur constituant une faute lourde ou d’opposition tardive.

Certes, il est souvent  difficile de déterminer la date à laquelle le titulaire a eu connaissance de la disparition de la carte pour en déduire un retard dans la formalité de l’opposition, il peut être tout aussi délicat de cerner la notion de « faute lourde ».

 Il va de soi qu’une telle faute est caractérisée lorsque le titulaire communique son numéro de code confidentiel à un tiers, le note à proximité de la carte ou encore laisse sa carte dans une voiture restée ouverte en stationnement sur la voie publique ou dans un local librement accessible au public.

Le 10 novembre 2006, la cour d’appel de Rennes est même allée plus loin et a refusé de limiter la responsabilité du titulaire d’une carte laissée dans la boîte à gants d’un véhicule pourtant fermé à clef et stationné dans l’enceinte de l’entreprise qu’il dirigeait, dès lors que les clés étaient accrochées en un lieu de l’entreprise aisément accessible et non contrôlé.

En revanche, il a été jugé que le fait d’oublier sa carte bancaire dans le distributeur de billets n’était pas constitutif d’une faute lourde dès lors qu’aucun élément n’établissait que le code confidentiel avait été divulgué volontairement par le détenteur de la carte bancaire (Besançon, 2e ch. civ., 14 nov. 2006, RG n° 05/00211).

Concrètement, la charge de la preuve de la négligence du titulaire constitutive d’une faute lourde pèse sur l’établissement financier émetteur de la carte, étant entendu que « la circonstance que la carte ait été utilisée par un tiers avec composition du code confidentiel est, à elle seule, insusceptible de constituer la preuve d’une telle faute ».

Ce principe est clairement posé par la Cour de cassation (2 octobre 2007 ; pourvoi n°G 05-19.899- Arrêt n° 1050 FS-PBIR) dans l’arrêt reproduit ci-dessous.

 En définitive, en cas de perte ou vol d’une carte bancaire, il appartient à l’émetteur de la carte qui se prévaut d’une faute lourde de son titulaire, au sens de l’article L. 132-3 du code monétaire et financier, d’en rapporter la preuve. La circonstance que la carte ait été utilisée par un tiers avec composition du code confidentiel est, à elle seule, insusceptible de constituer la preuve d’une telle faute.

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« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d’instance de Roanne, 5 juillet 2005) rendu en dernier ressort, que Mme M. était titulaire d’un compte à La Poste, aux droits de laquelle est venue la Banque postale (la banque) et d’une carte de paiement ; que le 10 avril 2004, elle a fait opposition à l’utilisation de sa carte déclarée perdue le 9 avril 2004 ; qu’une certaine somme a néanmoins été dépensée avant la mise en opposition ; que la banque ayant constaté que toutes les opérations effectuées avaient été réalisées avec contrôle du code confidentiel en a déduit la négligence de sa cliente et lui a alors imputé la totalité des prélèvements opérés avant opposition ; que Mme M.  a assigné la banque en restitution des sommes ainsi portées au débit de son compte ;

Attendu que la banque fait grief au jugement de l’avoir condamnée au remboursement de la somme de 2 742,42 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que Mme M.  s’était engagée contractuellement à assurer la conservation de sa carte ainsi que la conservation et la confidentialité de son code ; que suite à la perte de sa carte et à son utilisation avec composition du code confidentiel, il appartenait à Mme M. d’établir qu’elle n’avait pas commis de faute lourde ; qu’en mettant à la charge de la banque, l’obligation de prouver que Mme M.  avait été négligente dans la protection de son code confidentiel, le tribunal a violé les articles 1134, 1147 et 1315 du code civil, ensemble l’article L. 132-3 du code monétaire et financier ;

2°/ que le tribunal s’est borné à relever que l’actualité récente faisait état de plusieurs cas dans lesquels des malfaiteurs étaient parvenus à s’approprier des codes confidentiels de cartes bancaires sans pour autant bénéficier de la négligence voire de la complicité du titulaire de ladite carte ; qu’en l’état de ces seules énonciations par lesquelles il n’a pas caractérisé, autrement que par un motif d’ordre général et abstrait, l’absence de négligence de Mme M., le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, ensemble l’article L. 132-3 du code monétaire et financier ;

Mais attendu qu’en cas de perte ou vol d’une carte bancaire, il appartient à l’émetteur de la carte qui se prévaut d’une faute lourde de son titulaire, au sens de l’article L. 132-3 du code monétaire et financier, d’en rapporter la preuve ; que la circonstance que la carte ait été utilisée par un tiers avec composition du code confidentiel est, à elle seule, insusceptible de constituer la preuve d’une telle faute ;

Attendu qu’en retenant que la banque était défaillante dans l’établissement de la faute lourde alléguée à l’encontre de Mme M. , le tribunal, qui n’a pas inversé la charge de la preuve, a, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut-être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

 

 

 

 

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