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Communication par RPVA : attention au consentement !

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Dans un arrêt du 14 décembre 2012, la Cour d’appel de Toulouse a jeté le trouble sur les modalités d’utilisation du Réseau Privé Virtuel des Avocats (RPVA).

Le RPVA est un réseau informatique sécurisé permettant la communication entre avocats et les juridictions. A ce titre, il permet l’échange d’actes de procédure civile, et pénale depuis peu, dans le strict respect des dispositions légales. Les avocats peuvent alors, via le service e-barreau, se communiquer des conclusions, des pièces ou un jugement.

En l’espèce, un avocat avait communiqué en cause d’appel par le biais du RPVA des conclusions à son confrère représentant de la partie adverse. Or, l’avocat destinataire, non sans malice, va contester cette communication en arguant qu’elle ne pouvait lui être opposée pour défaut de consentement.

Il s’appuie, pour cela, sur l’article 748-2 du Code de procédure civile qui énonce que le destinataire de conclusions par voie électronique doit « consentir expressément à l’utilisation de la voie électronique » à moins que des dispositions spéciales n’imposent l’usage de ce mode de communication.

Il soutient ainsi tout naturellement qu’il n’a pas donné son consentement exprès à l’utilisation du RPVA et que, par voie de conséquence, le dépôt des conclusions de la partie adverse par ce moyen doit être considéré comme irrégulier.

La Cour d’appel de Toulouse va lui donner raison en décidant que :

« Le recours au RPVA ne peut se faire, s’agissant de la notification entre avocats de leurs conclusions, qu’en cas d’accord express et non tacite de l’avocat destinataire, étant relevé que cet accord ne peut en aucun cas être tacite ou se présumer et qu’il ne peut résulter de la seule inscription de l’avocat destinataire à e-Barreau ou de l’adhésion de ce dernier au RPVA ».

Cette décision prend à contrepied la jurisprudence de la Cour d’appel de Bordeaux établissant, dans un arrêt du 5 mars 2012 , une présomption de consentement de l’avocat adhérent au RVPA :

« L’avocat adhérent est présumé avoir accepté de consentir à l’utilisation de la voie électronique pour la signification des jugements à son égard. Il n’est donc pas nécessaire de recueillir son accord express en application de l’article 748-2 du Code de procédure civile qui n’a pas vocation à s’appliquer entre avocats postulants adhérents au RVPA ».

Cette opposition entre les deux décisions d’appel pourrait s’expliquer par la différence entre les faits de chaque espèce, ce que le demandeur n’a pas manqué de soulever devant la Cour d’appel de Toulouse. Si la décision bordelaise portait sur la communication d’un jugement, l’arrêt du 14 décembre 2012 portait sur la communication de conclusions.

Dès lors, on peut prétendre que la communication de conclusions est une étape majeure du respect du principe du contradictoire, protégé par l’article 6, 1, de la Convention européenne des Droits de l’Homme, alors que la communication du jugement joue un rôle moindre dans la mesure où son absence n’empêche pas les parties de faire appel. En conséquence, la présomption de consentement n’aurait pas eu le même impact sur les droits de la partie recevant communication des actes.

La Cour d’appel de Toulouse a ainsi pu considérer qu’en l’espèce, la présomption de consentement aurait porté une atteinte trop forte au principe du contradictoire et du procès équitable. Elle infirme l’ordonnance du juge de la mise en état et déclare la communication des conclusions par le RPVA irrecevable en application de l’article 910 du Code de procédure civile.

Les conclusions de l’intimé sont donc rejetées. La manœuvre n’était pas innocente puisque le délai de deux mois pour conclure, imposé par l’article 909 du CPC, étant écoulé, l’intimé n’est plus en mesure de déposer de nouvelles conclusions. Il ne peut donc plus opposer ses arguments à l’adversaire. La Cour d’appel n’est alors saisie que des seuls moyens de l’appelant dont il lui appartiendra d’apprécier s’ils sont convaincants.

Cette irrégularité déjà lourde de conséquence aurait pu être beaucoup plus grave si l’irrégularité de communication avait été soulevée contre l’appelant et non l’intimé. Dans ce cas, et si les délais sont expirés, la caducité de l’appel pourrait être prononcée suite au prononcé de l’irrecevabilité des conclusions de l’appelant . C’est alors l’ensemble de la procédure de seconde instance qui est remise en cause avec, en prime, l’impossibilité de refaire appel .

En tout état de cause, il convient de rester particulièrement prudent lors de l’utilisation du réseau RPVA. L’avocat éclairé recueillera donc précautionneusement le consentement du conseil de la partie adverse avant tout communication d’acte par la voie immatérielle. Et puisque qu’un avocat prévenu en vaut deux …

Sources :

CA Toulouse, 4 dec. 2012, n° 12/04955
CA Bordeaux, 5 mars 2012, n° 11/4968

[2] Article 908 du CPC : A peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour conclure.
[3] Article 538 du CPC : le délai de recours par une voie ordinaire est d’un mois en matière contentieuse ; il est de quinze jours en matière gracieuse.
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