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La Cour d’appel de Paris confirme l’abus de position dominante en cas de refus discriminatoire d’accès à une base de données d’informations médicales

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Par Gérard HAAS et Marie d’AUVERGNE

Par un arrêt n°2014/17586 du 24 septembre 2015, la Cour d’appel de Paris confirme la décision de l’Autorité de la concurrence qui a condamné la société Cegedim pour abus de position dominante.

Pour rappel, l’Autorité de la concurrence avait, par une décision n°14-D-06 du 8 juillet 2014, condamné la société Cegedim à une amende de 5,7 millions d’euros pour abus de position dominante caractérisé par le refus discriminatoire de vendre aux seuls clients de son concurrent Euris sa base de données d’informations médicales Onekey.

Elle avait par ailleurs refusé de retenir la qualification d’infrastructure essentielle de la base de données, dès lors que la mise en place d’une base de données concurrente de Onekey était techniquement réalisable.

Pour plus d’informations concernant cette décision, cliquez ici.

La Cour d’appel a donc confirmé en tous points la décision de l’Autorité de la concurrence concernant à la fois la qualification de la base de données en infrastructure essentielle, la pratique de la vente liée et la position dominante de la société Cegedim sur le marché des bases de données médicales.

 

  • La demande de la société Euris relative à l’existence d’une infrastructure essentielle est irrecevable pour défaut d’intérêt à agir

La société Euris reprochait à Cegedim de lui opposer à la fois un refus de vente discriminatoire et un refus d’accès à une infrastructure essentielle. La Cour d’appel estime que ces deux griefs dénoncent en réalité une même pratique, à savoir le refus opposé par Cegedim d’accéder à sa base de données Onekey.

Or ce refus a bien été sanctionné par le juge de la concurrence puisque la pratique en question a été qualifiée d’abus de position dominante et la société Cegedim condamnée. Par conséquent, la société Euris a déjà obtenu gain de cause devant l’Autorité de la concurrence sur ce point.

Ainsi, la Cour considère que la qualification d’infrastructure essentielle ne modifie en rien le caractère illicite de la pratique en cause, ni les effets de la décision prise par l’Autorité. Elle a donc jugé irrecevable pour défaut d’intérêt à agir la demande de la société Euris concernant le refus de l’Autorité de qualifier la base de données d’infrastructure essentielle.

 

  • La pratique de la vente liée n’est pas caractérisée par le fait de subordonner l’accès à sa base de données à l’achat de ses logiciels

La société Euris soutient que la société Cegedim cherchait à l’évincer du marché des logiciels C en subordonnant l’accès à sa base de données Onekey à l’emploi de ses propres logiciels, allant même jusqu’à proposer la gratuité de son logiciel CRM Teams à ses clients Onekey, et dénonce ainsi une pratique anticoncurrentielle.

Toutefois, selon la Cour, le simple fait que 56% des clients achètent les deux produits, la base de données Onekey et les logiciels C., et que parmi ceux-ci se trouvent les laboratoires les plus importants, ne permet pas de rapporter la preuve des pratiques de remises anticoncurrentielles reprochées à Cegedim.

La société Euris ne produisant aucun élément de nature à démontrer que Cegedim se livrerait ainsi à la pratique de la vente liée, la Cour a rejeté sa demande de réformation de la décision de l’Autorité sur ce point.

  • L’abus de position dominante de la société Cegedim reste toutefois caractérisé

La Cour rappelle que l’existence d’une position dominante correspond à une situation de puissance économique qui donne à l’entreprise qui la détient le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective sur le marché en cause.

Elle confirme également que la société Cegedim se trouve en position dominante sur le marché des bases de données d’informations médicales puisqu’elle en détient 78% des parts de marchés. Ainsi, en refusant de vendre une licence d’accès à sa base de données aux seuls clients de la société Euris, elle a commis un abus de position dominante constituant une pratique discriminatoire au sens des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 du TFUE.

Les bases de données médicales jouent en effet un rôle particulièrement important du fait du nombre colossal d’informations de santé gérées par l’assurance maladie, qui est de plusieurs milliards en France. Ces informations sont ensuite exploitées par des logiciels de gestion client CRM (Customer relationship management) développés par des sociétés comme la société Euris.

En confirmant l’analyse de l’Autorité de la concurrence, la Cour d’appel sanctionne ainsi le propriétaire exclusif d’une base de données médicales qui discrimine les clients actuels ou potentiels d’un concurrent en refusant de leur vendre sa base de données, se rendant coupable d’un abus de position dominante.

Par ailleurs, le contexte particulier de soupçon de contrefaçon de ses droits de propriété intellectuelle par la société Euris ne permet pas à la société Cegedim de justifier ses pratiques anticoncurrentielles. L’Autorité de la concurrence comme la Cour d’appel de Paris rappellent qu’il existe des voies de droit appropriées pour réprimer ce type de comportement illicite.

Par conséquent, cette décision de la Cour d’appel de Paris, bien que faisant actuellement l’objet d’un pourvoi en cassation, prouve une nouvelle fois la nécessité pour une entreprise en position dominante de ne pas pratiquer de discriminations entre ses clients qui pourraient être qualifiées de pratiques anticoncurrentielles.

Si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, contactez le cabinet HAAS Avocats.

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