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Droit de l'homme et liberté d'expression

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Connue plus ou moins de tous les systèmes juridiques, la liberté d’expression (protégée au titre de l’article 10 de la Convention) est, pour la Cour Européenne des Droits de l’Homme, un idéal qui doit être sauvegardé tout en garantissant le plus possible d’autres droits fondamentaux. Parmi ces droits fondamentaux figure notamment l’incrimination de la diffamation, définie en France comme toute « allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé”. Et, depuis plus d’un quart de siècle, la CEDH protège la liberté d’expression au même titre qu’elle incrimine la diffamation.

Dans le cadre de l’affaire Reznik c/ Russie, c’est à une complexe articulation des deux principes qu’a du s’atteler la Cour. L’affaire concerne une action en diffamation exercée contre le bâtonnier du barreau de Moscou pour des propos tenus lors d’une émission de télévision au sujet du comportement de gardiens de prisons à l’égard de l’avocate de l’opposant russe Mikhail Khodorkovskiy.

Dans le cas des journalistes par exemple, une récente affaire (CEDH, 30 Mars 2004, Radio France c/ France) montre que des ingérences étatiques peuvent restreindre la liberté d’expression lorsqu’il est porté atteinte à la dignité et à l’honneur d’une ou plusieurs personnes. En l’espèce, les juges estiment que, si l’ingérence russe a une base légale (le Code civil russe) ainsi qu’un but légitime, cette dernière ne peut être justifiée par la nécessité de protéger la réputation des plaignants.

Passé ce simple rappel soulevé par la CEDH, l’arrêt emporte avec lui une seconde portée qu’il convient d’étudier. En effet, l’action est initiée sur le fondement, notamment, que le requérant ayant la qualité d’avocat, ce dernier aurait du faire preuve d’une retenue particulière dans le choix de ses expressions. La qualité d’avocat s’accompagnerait donc d’une obligation de neutralité. A cet égard, la Cour indique, une fois de plus, que les avocats possèdent le droit de se prononcer sur le fonctionnement de la justice, pourvu que leurs critiques ne franchissent pas certaines limites. Si on peut s’interroger sur le contenu de ces limites, ce principe paraît tout à fait clair.

Si, sans pour autant céder à un trop facile gargarisme franco-français, il convient de rappeler que nous ne sommes pas en Russie, quelques observations peuvent être faites sur cette réflexion du gouvernement russe dans le cadre de la situation politique française actuelle.

En effet, se pose aujourd’hui en France, la question de la liberté de l’avocat. Ainsi, le rapport d’un groupe de travail sur les groupes d’intérêts présidé par le député-maire de Chalon-sur-Saône relève qu’une réflexion doit être menée sur la compatibilité des professions d’avocat et de parlementaire, au titre que son exercice ne sied pas à la morale. S’il convient de relever que cette compatibilité paraît bien plus justifiée que le cumul de plusieurs mandats électifs, il est nécessaire également d’observer que, pas plus en Russie qu’en France, un avocat n’a d’allégeances particulières à faire ni de comptes spécifiques à rendre.

Quand bien même la position russe consistant en une mise au pas des avocats vis-à-vis du pouvoir suscite l’émoi, il convient d’observer que cette tendance est également palpable en France, hélas de plus en plus. A cet égard également, Paris n’est plus désormais qu’à 3h40 de Moscou.

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