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Droit de rétention de l’hébergeur sur le site qu’il héberge

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Par un arrêt du 12 octobre 2010, la Cour d’appel de Toulouse a reconnu le droit pour un prestataire chargé de réaliser un site web et de l’héberger, de désactiver ce site tant que son client ne lui a pas réglé sa facture (CA Toulouse chambre 2 section 2 du 12 octobre 2010 n°08/05858).

La Cour fonde sa décision sur le droit de rétention qui est prévu à l’article 2286 2° du Code civil dans les termes suivants :

« Peut se prévaloir d’un droit de rétention sur la chose :
(…)
2°Celui dont la créance impayée résulte du contrat qui l’oblige à la livrer.
(…)
Le droit de rétention se perd par le dessaisissement volontaire ».

La Cour a néanmoins ressenti le besoin de justifier secondairement sa décision par l’application du principe de l’exception d’inexécution.

On peut imaginer qu’elle a craint de trop innover en consacrant un droit de rétention dématérialisé.

le droit de rétention s’exerce sur des choses corporelles

En effet, le droit de rétention s’exerce habituellement sur des choses corporelles. Il est souvent exercé par le transporteur ou le garagiste. Il a aussi été jugé qu’un expert comptable avait pu retenir les pièces comptables d’une société jusqu’au paiement de sa facture.

Cependant, le Code civil ne définit pas de quelle façon le droit de rétention devrait être exercé. Il ne limite pas non plus le type de chose qui peut en être l’objet.

La Cour s’est donc sentie libre de l’appliquer à un site web et de reconnaitre la possibilité de l’exercer de manière dématérialisée en le désactivant.

Il est vrai que l’appel au principe d’exception d’inexécution pouvait être tentant dans la mesure où son mécanisme ressemble à celui du droit de rétention. Les deux constituent indiscutablement un moyen de pression efficace sur le débiteur et la ressemblance est évidemment accentuée en présence d’un droit de rétention dématérialisé.

Pourtant, ils n’ont pas les mêmes effets.

Notamment, alors que l’exception d’inexécution est soumise à la relativité contractuelle, le droit de rétention, véritable sûreté réelle, est opposable aux sous-acquéreurs même s’ils sont de bonne foi. La Cour de cassation l’a récemment rappelé dans un arrêt du 24 septembre 2009. Dans cette espèce, deux personnes avaient acquis des campings cars en payant dument le prix au vendeur intermédiaire qui lui, ne l’avait en revanche, pas payé au vendeur originaire. Ce dernier a exercé son droit de rétention sur les documents administratifs des véhicules. La Cour d’appel a condamné le vendeur originaire à restituer les documents au motif que le vendeur intermédiaire défaillant était en liquidation judiciaire. La Cour de cassation a cassé l’arrêt au motif que le droit de rétention exercé par le vendeur originaire était opposable aux sous acquéreurs, la bonne foi de ceux-ci et l’insolvabilité du vendeur intermédiaire ne pouvant faire dégénérer en abus l’exercice de ce droit (Civ. 1ère 24 septembre 2009 n°08-10152).

Compte tenu du régime particulier dont bénéficie le droit de rétention, sa reconnaissance au profit d’un hébergeur ouvre la voie à bien des questions et en conséquence, à de futurs litiges.

Sources:

Jurisclasseur Banque Crédit Bourse fasc. 760 « Sûretés » Deen Gibirila

Dominique Legeais « Droit de rétention d’un hébergeur de site web » Revue de droit bancaire et financier n°2 mars 2011 comm. 54

CA Toulouse chambre 2 section 2 du 12 octobre 2010 n°08/05858

Civ. 1ère 24 septembre 2009 n°08-10152

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