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[#e-commerce] Les pratiques trompeuses des services de télécommunication en ligne dévoilées par la Commission européenne

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La constante croissance de la consommation de services à distance pourrait parfois conduire à des pratiques commerciales qui ne sont pas conformes à la législation européenne en matière du droit de la consommation. Les sites web doivent toujours tenir compte des spécificités des services à distance et agir dans l’intérêt des consommateurs européens qui devraient jouir d’une protection transparente et efficace. Dans ce sens, les sites proposant des services en ligne sont engagés à développer leur activité de manière loyale, en se conformant au principe général de bonne foi.
Depuis 2007, la Commission Européenne organise chaque année le contrôle des sites web pour un secteur particulier. Le réseau de coopération en matière de protection des consommateurs (CPC), chargé de réunir les autorités publiques de tous les États membres de l’UE (et d’autres pays de l’EEE) qui sont responsables de l’application de la législation concernant la protection des consommateurs de l’UE, accompagne et assiste la Commission à la mise en œuvre des ces contrôles.
Cette année, la Commission et les autorités chargées de la protection des consommateurs ont publié leurs constatations sur un « passage au crible »[1] des 207 sites web proposant des services de téléphonie fixe et mobile, des services internet et des services de diffusion audio et vidéo en continu. En effet, les autorités chargées de la protection des consommateurs ont effectué des contrôles sur ces sites dans le but de détecter les éventuelles violations et de vérifier leur conformité au niveau du droit de l’UE en matière de protection du consommateur.
Les résultats étant inquiétants – 163 sur 207 des sites web contrôlés sont susceptibles de léser les consommateurs européens –  les propriétaires des sites devront immédiatement corriger les manquements pour que la législation européenne soit respectée. Compte tenu du degré de gravité des manquements constatés (pratiques commerciales déloyales, violation de l’obligation d’information, informations pas éclairées etc.), les autorités feront appel aux procédures nationales d’exécution dont elles disposent.
Parmi les manquements essentiels se trouvent les suivants :
 

  • « Dans 50 % des cas, les sites web présentaient un ensemble de services comme étant gratuit ou à prix réduit, alors qu’il s’agissait seulement de services proposés dans le cadre d’une offre groupée »

 La pratique susmentionnée, à savoir, le fait de laisser croire au consommateur qu’il bénéficie d’une prestation de service gratuite alors qu’en réalité le prix global des produits proposés englobe celui des prestations prétendument offertes, est réputée trompeuse aux termes de la Directive européenne du 11 mai 2005[2].
De manière plus précise, en son Annexe 1, ladite Directive décrit dans une liste les pratiques qui sont considérées comme trompeuses en toutes circonstances. En effet, « Décrire un produit comme étant « gratuit », « à titre gracieux », « sans frais » ou autres termes similaires si le consommateur doit payer quoi que ce soit d’autre que les coûts inévitables liés à la réponse à la pratique commerciale et au fait de prendre possession ou livraison de l’article » constitue une pratique trompeuse dans tous les cas[3].
Rappelons que ladite liste a été transposée en droit interne à l’article L. 121-4 du code de la consommation[4]. Il convient également de noter que le droit français précise que les « pratiques commerciales déloyales » recouvrent à la fois les pratiques commerciales trompeuses visées aux articles L.121-1 à L.121-7 du Code de la Consommation et les pratiques commerciales agressives visées aux articles L.122-11 à L.122-15 dudit Code.

  • « Dans 78,7 % des cas, les sites web ne comprenaient pas de lien vers la plateforme de règlement en ligne des litiges »

Le fait pour un service de télécommunication en ligne de ne pas disposer un lien vers la plateforme de règlement en ligne des litiges constitue une violation des dispositions du Règlement du 21 mai 2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation[5].
En effet, la plateforme de règlement en ligne des litiges[6] permet de « résoudre un problème de consommation en ligne de manière équitable et efficace sans aller en justice ». Les consommateurs qui rencontrent des problèmes au regard des biens ou des services achetés en ligne sont en droit d’utiliser cette plateforme afin d’introduire une plainte qui sera traitée par un organisme de règlement des litiges indépendant. Aux termes de l’article 14 du Règlement, les e-commerçants établis dans l’Union Européenne sont tenus d’informer les consommateurs de l’existence d’une telle plateforme en disposant un lien sur leurs sites web. 
Rappelons qu’un Règlement européen n’a pas besoin d’être transposé en droit national. Il est directement applicable sans aucune mesure dans tout État-Membre.
 

  • «  sur 40,6 % des sites web, le système de règlement des litiges n’était pas décrit »

Bien que les consommateurs aient le droit de connaître l’existence de modes extrajudiciaires de règlement des litiges, un grand pourcentage des sites web contrôlés ne les en informent pas. En effet, les litiges éventuels entre consommateurs et professionnels peuvent être réglés facilement et rapidement via des modes alternatifs de règlement des litiges. La Directive du 21 mai 2013[7], ayant pour objet de faciliter le règlement des litiges éventuellement survenus entre professionnels et consommateurs, propose « le règlement extrajudiciaire des litiges (REL) » qui permettra aux consommateurs de recourir à une procédure simple, rapide et peu onéreuse auprès d’entités indépendantes et impartiales. En outre, l’article 6 de la Directive européenne relative aux droits des consommateurs[8] prévoit l’obligation d’informer le consommateur sur :
t)« … le cas échéant, la possibilité de recourir à une procédure extrajudiciaire de réclamation et de réparation à laquelle le professionnel est soumis et les modalités d’accès à celle-ci. »
Il convient de souligner que la Directive susmentionnée et le Règlement no 524/2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation sont deux instruments législatifs liés et complémentaires. Ladite directive a été transposée en droit interne par l’ordonnance relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation[9].
 

  • « 31,9 % des sites web pouvaient modifier unilatéralement les conditions du contrat ou les caractéristiques des services sans en informer le consommateur et sans permettre à ce dernier de résilier le contrat »

Le fait de ne pas informer le consommateur concernant une modification unilatérale des conditions du contrat ou des caractéristiques des services constitue un manquement à l’obligation d’information. L’article 6 de la Directive européenne relative aux droits des consommateurs consacre le droit à l’information précontractuelle en ce qui concerne les contrats à distance et les contrats hors établissement. En effet, le professionnel est toujours obligé de préciser certaines informations, entre autres, « les conditions de résiliations du contrat ».
En ce qui concerne le droit national, ladite directive a été transposée en droit français par le décret n° 2014-1061 du 17 septembre 2014 relatif aux obligations d’information précontractuelle et contractuelle des consommateurs et au droit de rétractation[10]. L’obligation d’information est expressément formulée à l’article L111-1 du code de la consommation[11].
 

  • « 25,1 % des sites web ne fournissaient pas d’informations claires et exactes concernant les modalités d’indemnisation et de remboursement dans les cas où le service proposé ne correspond pas à ce pour quoi le client a payé »

Le fait de ne pas fournir d’informations claires et exactes est considéré comme une action trompeuse aux termes de la Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005[12]. En particulier, ladite directive dispose, en son article 6, qu’une pratique commerciale est réputée trompeuse si :
« d’une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen, même si les informations présentées sont factuellement correctes, en ce qui concerne un ou plusieurs des aspects ci-après et que, dans un cas comme dans l’autre, elle l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement : … g) le droit de remplacement ou de remboursement selon les dispositions de la directive 1999/44/CE[13]du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation (1), ou les risques qu’il peut encourir ».
En l’occurrence, 25,1 % des sites web contrôlés ont tenté d’induire en erreur les consommateurs en ce qui concerne les modalités d’indemnisation et de remboursement dans les cas où le service proposé ne correspond pas à ce pour quoi le client a payé.
  S’agissant du droit interne, l’article L211-1 du code de la consommation[14] dispose que « Les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. »
 

  • « 21,7 % des sites web ne fournissaient pas d’informations claires et exhaustives sur le renouvellement automatique du contrat »

La Directive concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs[15] a pour objet, entre autres, de protéger les consommateurs contre les services non sollicités :
« Sans préjudice des dispositions des États membres relatives à la reconduction tacite de contrats à distance lorsque celles-ci permettent une telle reconduction tacite, les États membres prennent les mesures nécessaires pour :
 — interdire la fourniture de services financiers à un consommateur sans demande préalable de celui-ci, lorsque cette fourniture comporte une demande de paiement immédiat ou différé »
— dispenser le consommateur de toute obligation en cas de fourniture non demandée, l’absence de réponse ne valant pas consentement. »
En l’espèce, 21,7 des sites contrôlés ne fournissaient pas d’informations claires et exhaustives sur la tacite reconduction du contrat.
En ce qui concerne les dispositions du droit français, l’article L215-1 du droit de la consommation[16] dispose que les professionnels qui proposent des contrats tacitement reconductibles doivent informer au préalable les consommateurs de leur faculté de ne pas les renouveler. Cette information doit être claire et compréhensible, incluant la date à laquelle la reconduction interviendra.
Le 11 avril 2018, la Commission européenne a publié sa proposition sur une nouvelle donne pour les consommateurs[17] dans le but de protéger davantage leurs droits.
Pour tout renseignement complémentaire sur le droit de la consommation, contactez-nous ici.
 
[1] http://europa.eu/rapid/press-release_IP-18-3829_fr.htm
[2] Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales »)
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32005L0029&from=FR
[3] CA Paris, 2 mai 2000
[4]https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006069565&idArticle=LEGIARTI000032227293
[5] Règlement (UE) No 524/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation et modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2009/22/CE (règlement relatif au RLLC)
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32013R0524&from=EN
[6] Disponible à l’adresse suivante : https://ec.europa.eu/consumers/odr/main/index.cfm?event=main.home.show&lng=FR
[7] Directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation et modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2009/22/CE (directive relative au RELC)
http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32013L0011&from=FR
[8] Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32011L0083&from=FR
[9] Ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation
https://www.legifrance.gouv.fr/eli/ordonnance/2015/8/20/EINC1512728R/jo/texte
[10] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029470741&categorieLien=id
[11]https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=34EFDA6CB485D3217371936C2C9B9D5B.tplgfr26s_1?idArticle=LEGIARTI000032227352&cidTexte=LEGITEXT000006069565&dateTexte=20180523
[12] Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales »
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32005L0029&from=FR
[13] Directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:31999L0044&from=FR
[14]https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006069565&idArticle=LEGIARTI000032221205&dateTexte=&categorieLien=cid
[15] Directive 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32002L0065&from=FR
[16]https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006069565&idArticle=LEGIARTI000032221237&dateTexte=&categorieLien=cid
[17] http://europa.eu/rapid/press-release_IP-18-3041_fr.htm

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