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Une histoire d’amour prolifique : fiction ou réalité ?

roman damour

Roman ou biographie, fiction ou réalité, un célèbre présentateur du journal télévisé vient d’en faire les frais devant le Tribunal de grande instance de Paris. En effet, se fondant sur une violation de la vie privée et d’actes de contrefaçon, les magistrats de la 17ème chambre civile ont condamné ce célèbre journaliste à la somme de 33.000 euros pour avoir publié un roman relatant sa liaison avec son ex-compagne et pour avoir publié certaines de ses lettres d’amour.

En effet, son livre joliment et discutablement intitulé « Fragments d’une femme perdue » fait état d’une relation amoureuse dont elle estime être la leur et retranscrit également des lettres d’amour qu’elle lui aurait adressé.

Il est possible de comprendre son émoi lorsque celle-ci fut persuadée que le livre en cause édité en 2009 relatait leur histoire commune et qu’il fut diffusé à pas moins de 75.000 exemplaires.

Elle décide alors d’assigner son ancien compagnon pour atteinte à la vie privée et contrefaçon.

L’argument soulevé de l’autre côté de la barre fut d’invoquer une œuvre de fiction, comme il est usuellement fait dans ce genre d’affaires.

Or, si les magistrats sont conscients qu’une œuvre de fiction retranscrit bien souvent le vécu et l’expérience de son auteur, ce dernier doit s’appliquer à camoufler les éléments de réalité de sorte que le lecteur ainsi que l’entourage de l’auteur ne sauraient se reconnaître.

L’auteur doit alors prendre garde à camoufler les différents aspects pouvant couvrir une personne telles que les origines, les références sociales et professionnelles, les critères physiques, moraux, familiaux, les problèmes de santé ou encore les tendances sexuelles de la personne, etc.

En l’espèce, le Tribunal a considéré que tel ne fut pas le cas. En effet, il énonce que les procédés littéraires utilisés par notre auteur ne suffisaient pas à différencier les personnages de la réalité, de sorte que l’œuvre ne peut être qualifiée de fictionnelle.

La présence de points communs précis, crus et parfaitement identifiables de leur liaison faisant perdre le caractère de fiction. Dès lors en relatant des passages intimes de leur vie commune, le défendeur a porté atteinte à la vie privée de son ex-compagne.

Il sera recommandé aux auteurs s’inspirant de leur vie de tous les jours d’être particulièrement vigilant pour ne pas porter atteinte à la vie privée de leur entourage.

Par ailleurs, il convient de noter que l’ex-compagne du présentateur a également été bien avisée d’attaquer celui-ci pour contrefaçon des lettres d’amour qu’elle lui envoyait.

En effet, l’article L. 112-2 du code de propriété intellectuelle accorde une protection à tout écrit littéraire.

Démontrant alors que ces lettres émanaient d’elle et que ces dernières étaient reproduites dans l’ouvrage litigieux, cette femme de 25 ans sa cadette a ainsi pu obtenir la condamnation de son ex-partenaire pour contrefaçon.

Si la demande de dommages et intérêts était pour le moins importante (150.000 euros), le Tribunal a évalué les actes de contrefaçon et le préjudice de la victime à 33.000 euros.

Réel préjudice ou fiction dans son évaluation ?

Or, si le livre a été vendu pour 18 euros, les droits que l’auteur perçoit en général peuvent varier entre 10% à 15% selon sa notoriété.

Cette affaire pose une nouvelle foi de la problématique de la faute lucrative. En effet, un calcul rapide permettrait d’arriver à la conclusion selon laquelle le bénéfice retiré de la vente du livre par l’auteur serait supérieur à la condamnation reçue pour atteinte à la vie privée et contrefaçon.

Dès lors, tant que le système français ne reconnait pas encore les « punitive damages », certains auteurs auront tout intérêt à poursuivre l’édition de leur ouvrage malgré les risques encourus.

Source :

Jugement du TGI de Paris du 07/09/2011

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