Par un arrêt de cassation en date du 17 juin 2009, la Cour de cassation a rappelé au terme d’un attendu de principe qu’en matière de divorce, la liberté de la preuve en matière de divorce, précisant que le juge ne peut écarter des débats un élément de preuve que s’il a été obtenu par violence ou fraude.
Dans cette affaire, le divorce avait été prononcé aux torts partagés. Afin de démontrer l’adultère de son ex-mari, l’épouse avait produit des minimessages dits « sms » que celui-ci avait reçu sur son téléphone portable professionnel dont elle avait fait établir la teneur par un procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice.
La Cour d’appel de Lyon, par un arrêt en date du 20 mars 2007 avait écarté des débats les « sms » considérant que ceux-ci relevaient « de la confidentialité et du secret des correspondances et que la lecture de ces courriers à l’insu de leur destinataire constitue une atteinte grave à l’intimité de la personne ». En conséquence, elle avait prononcé le divorce aux torts exclusifs de l’épouse. Celle-ci a alors formé un pourvoi devant la Cour de cassation. La Cour de cassation, par un arrêt en date du 17 juin 2009, a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Lyon au motif que celle-ci n’aurait pas constaté que les messages avaient été obtenus par violence ou fraude.
Si l’article 259 du Code civil en son premier alinéa consacre la liberté de la preuve en matière de divorce, l’article 259-1 de ce même code la restreint immédiatement en énonçant qu’un « époux ne peut verser aux débats un élément de preuve qu’il aurait obtenu par violence ou fraude. »
En dépit de leur caractère privé, les correspondances entre un conjoint et un tiers sont depuis longtemps recevables en matière de divorce. Cette recevabilité a été confirmée par la Cour européenne des Droits de l’Homme. La Cour a considéré au terme d’un contrôle de proportionnalité que si la production de lettres échangées entre un époux et un tiers pour établir une faute cause de divorce constitue une ingérence dans la vie privée de ces personnes, cette ingérence était justifiée au regard de l’objectif de protection des droits d’autrui, en l’occurrence au droit d’une personne mariée de mettre fin au lien matrimonial.
La décision commentée se place ainsi dans la droite ligne de l’abondante jurisprudence relative à la recevabilité des correspondances privées entre un des époux et un tiers voire entre un des époux et leur enfant en matière de divorce.
Sauf à considérer l’improbable hypothèse d’une remise volontaire, l’on perçoit mal en quoi une correspondance privée entre un époux et un tiers pourrait ne pas être obtenue frauduleusement. L’appropriation d’une correspondance privée ne caractérise-t-il pas un vol, autrement dit une soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ?
En tout état de cause, l’arrêt commenté paraît méconnaître les dispositions de l’article 259-2 du Code civil, curieusement non visé selon lequel : « Les constats dressés à la demande d’un époux sont écartés des débats s’il y a eu violation de domicile ou atteinte illicite à l’intimité de la vie privée. »
En l’espèce, l’établissement du procès-verbal de constat a manifestement été réalisé en violation de la disposition précitée, justifiant ainsi que la teneur du « sms » soit écartée des débats.
Source :
Lire l’arrêt de la Cour de Cassation du 17 juin 2009 n° 07-21796.