La Cour d’appel de Colombia vient de débouter une firme qui avait demandé la reconnaissance de l’inconstitutionnalité du SARBANES-OXLEY ACT de 2002. Un recours devant la Cour Suprême demeure néanmoins possible.
Le Sarbanes- Oxley Act (SOX) ou loi sur la réforme de la comptabilité des sociétés cotées et la protection des investisseurs, a pris racine dans les scandales financiers du début des années 2000 aux Etats-Unis tels que l’Affaire ENRON ou WORLDCOM.
Imposée aux sociétés cotées à la bourse de New York, cette loi a pour objectif de renforcer la transparence financière des firmes. Elle contribue à « l’exactitude et l’accessibilité des informations financières » via de nouvelles obligations comptables et impose aux dirigeants, via la fameuse section 404, la réalisation de contrôles internes.
La mise en conformité avec le SOX a généré des coûts très importants auprès des entreprises cotées et de leurs auditeurs en raison des lourds investissements informatiques qu’il nécessite.
Selon l’enquête Mazars, pour se conformer aux exigences du SOX, les sociétés de plus d’un milliard de dollars ont du dépenser la première année entre 3 à 5 millions de dollars. En 2004, la section 404 aurait couté à elle seule 30 milliards de dollars aux firmes américaines. Malgré une baisse des coûts les années 2005 et 2006 (enquête du Financial Executives International), 85% des sociétés pensent que les avantages ne compensent pas les coûts engagés.
Ces dépenses exorbitantes ont eu des répercutions non négligeables chez les actionnaires. Comme le remarque amèrement Maitre Lanois « ce seront finalement les actionnaires qui paieront le prix de la mise en conformité avec la loi, alors même que le but de la loi était la protection de ces mêmes actionnaires ». Par ailleurs, la mise en conformité est particulièrement difficile à réaliser pour les petites et moyennes entreprises suscitant ainsi des mécontentements comme en témoigne la présente affaire.
En 2006, quatre ans après sa parution, la constitutionnalité du Sarbanes-Oxley Act a été mise en cause par un petit cabinet d’audit, BECKSTEAD & WATTS LLP, soutenu par un groupe de défense des entreprises, le FREE ENTERPRISE FUND pour non respect du principe de séparation des pouvoirs, essence même de la Loi Fédérale américaine.
Ils reprochaient non seulement au SOX de donner au Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB), le « gendarme des comptables », un large pouvoir échappant au contrôle du président des Etats-Unis, mais aussi de méconnaitre le pouvoir de nomination du président au profit d’une agence indépendante, la Securities and exchange Commission (SEC), qui est la seule habilitée à nommer les membres du PCAOB.
Les plaideurs soulèvent des points très intéressants bien que leurs motivations ne semblent pas exclusivement juridiques. En effet derrière le principe de la séparation des pouvoirs se profile une critique profonde du SOX qui génère des coûts exorbitants auprès des petites et moyenne structures.
Malgré le spectre de la confusion des pouvoirs, la Cour d’appel a néanmoins reconnu le 22 août la constitutionnalité du Sarbanes-Oxley Act en rappelant que la Cour Suprême avait déjà eu à statuer sur le sort des agences indépendantes. Elle les avait alors considérées en accord avec la Constitution. Elle a par ailleurs affirmé que le pouvoir de contrôle du président sur le PCAOB était suffisamment respecté dans la mesure où c’est à lui que revient la prérogative de nomination du président de la SEC qui nommera à son tour les membres du PCAOB.
Bien que déboutés de leurs prétentions, les plaideurs ne semblent pas vouloir en rester là. Renforcés par le soutient d’un des juges de la Cour de Colombia, ils évaluent actuellement avec leur avocat Kenneth Starr, rendu célèbre par son intervention dans l’affaire Monica Lewinsky, l’opportunité d’un recours devant la Cour suprême. Affaire à suivre !
Source :
Lanois P., L’effet extraterritorial de la loi SARBANES OXLEY, France, Revue Banque Edition 2008