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Présomption d’innocence et diffamation : la prudence s’impose

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La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 23 novembre 2010, affirme sa position concernant l’exception de bonne foi en matière d’infractions de presse édictée à l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse au regard du respect dû à la présomption d’innocence.

Avant toute chose, il convient de rappeler que et peut être invoquée au cours d’un procès en diffamation. De plus, pour en rapporter la preuve, le mis en cause peut, pour sa défense, communiquer des éléments provenant d’une violation du secret de l’enquête ou de l’instruction s’ils sont de nature à établir sa bonne foi.

C’est dans ce cadre que la Chambre criminelle de la Cour de cassation s’est prononcée

L’affaire prend son origine dans la publication sur Internet par le dirigeant d’un syndicat d’avocats de deux articles dénonçant des pratiques prétendument « douteuses » notamment d’un avocat secrétaire de la conférence du stage. En effet, ces articles dénonçaient un détournement de fonds, octroyés par l’Ordre des avocats, ayant permis de financer l’achat de vêtements, de voyages en Patagonie et à Ibiza, et de soirées dans des restaurants étoilés.

Mais la Cour de cassation a porté toute son attention sur les propos tenus quant à la plainte pour abus de confiance déposée par ledit syndicat suite à l’assignation en diffamation délivrée par les avocats visés dans lesdits articles.

En effet, celle-ci n’a pas cassé la décision de la Cour d’appel de Versailles en date du 16 février 2010 sur le caractère diffamatoire des propos tenus mais sur l’appréciation de la bonne foi.

La décision retient la bonne foi du dirigeant syndical au motif que la campagne menée par ce dernier s’inscrivait dans le contexte d’un combat « destiné à moraliser un certain nombre de pratiques considérées comme déviantes mise en place par les dirigeants de la conférence du stage ». Ainsi, l’action syndicale visait uniquement à s’attaquer à un « establishment » et était fondée sur des éléments recueillis lors de l’instruction préparatoire.

Elle en déduit donc que l’enquête menée apparaissait sérieuse tandis que le ton employé s’inscrivait bien dans un « contexte de liberté syndicale » et ne manifestait aucune animosité personnelle. Dès lors, les limites de la liberté d’expression consacrée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme étaient respectées.

L’immunité acquise par le dirigeant syndical sera cependant remise en cause par la haute juridiction puisqu’elle reprend la Cour d’appel en ce qu’elle a omis d’examiner si l’auteur des propos avait répondu à une obligation particulière de prudence de manière à ce que la présomption d’innocence soit assurée.

Elle ne devait donc pas se borner à retenir uniquement l’absence d’animosité personnelle dans le ton donné aux articles publiés sur Internet.

Il faut en conclure que, lorsqu’une instruction est en cours, en l’espèce introduite par la plainte pour abus de confiance, il convient de respecter également la présomption d’innocence édictée à l’article 9-1 du Code civil qui impose d’être particulièrement vigilant quant aux propos tenus.

De cette manière, la Cour de cassation délimite une nouvelle fois le principe de la liberté d’expression et le concilie avec le respect de la présomption d’innocence dont toute personne a le droit de bénéficier.

Sources: Cass. Crim 23 novembre 2010, n° pourvoi 10-81847, www.legifrance.fr

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