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Producteur de phonogramme : l'investissement est insuffisant

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Le producteur de phonogramme est celui qui est à l’initiative de l’enregistrement et de la fixation et qui en assume les risques financiers. Du moins, c’était la position jurisprudentielle retenue avant l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 janvier 2011.
Cet arrêt nous contraint à réapprécier les conditions d’application du régime des producteurs de phonogramme. Rappelons brièvement les faits :

  • En janvier 1987, la société Éditions du Félin prend l’initiative de produire les chansons « Étienne » et « Un espoir » de l’artiste Guesh Patti. La société Comotion Musique participe alors au financement de cet enregistrement.
  • Le 26 octobre 1987, la société Comotion Musique cède ses droits sur ces enregistrements à la société EMI Music France.
  • En 2003, la société Arcade Music Company France commercialise une compilation intitulée « Les années club » reproduisant l’enregistrement de la chanson « Étienne ».
  • La société EMI assigne, alors, la société Arcade sur les fondements de contrefaçon et de concurrence parasitaire devant le tribunal de commerce de Paris.

La société EMI a-t-elle qualité pour agir, a l’encontre de la société Arcade, sur le fondement de la contrefaçon du phonogramme ?

Rappelons que l’action en contrefaçon est exercée par le titulaire d’un droit de propriété industrielle demandant que soit reconnue la violation de son droit.
Ainsi, il s’agit de déterminer si la société EMI est réellement le titulaire des droits de propriété intellectuelle reconnus à un producteur de phonogramme sur les enregistrements litigieux.
Le producteur de phonogramme est défini par l’article L.213-1 du code de la propriété intellectuelle comme « la personne, physique ou morale, qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de sons ».
La notion de « responsabilité » est à rapprocher de la notion de “risque des investissements ”qui figure dans la définition donnée du producteur de base de données par l’article L.341-1 du code de la propriété intellectuelle .
Ainsi, l’aspect économique de la relation entre l’auteur (ou l’auteur-interprète) et le producteur est pris en compte. L’investisseur prend des risques financiers, et, à ce titre, il bénéficie de prérogatives spécifiques :

  • autoriser ou interdire l’utilisation et la reproduction directe ou indirecte du support d’enregistrement
  • contrôler toute utilisation, reproduction, mise à la disposition du public, qu’elle prenne la forme d’une vente, d’un échange ou d’un louage, ainsi que toute communication au public de l’œuvre.

En l’espèce, il est avéré que la société Comotion a participé financièrement à la production des phonogrammes litigieux. Il n’est pas contesté que les droits de propriété intellectuelle détenus sur un phonogramme sont cessibles.
En conséquence, la Cour d’appel de Montpellier aurait pu reconnaitre la qualité de producteur de phonogramme à la société EMI et condamner le contrefacteur.
Au contraire, la cour déclare que :

« n’a pas la qualité de producteur de phonogrammes, la société qui participe financièrement à la production de phonogrammes, alors que cette participation n’implique ni initiative, ni responsabilité au sens de l’article cité ci-dessus ».

La société qui participe financièrement à la production de phonogramme n’a pas la qualité de producteur de phonogramme. Investir est insuffisant pour bénéficier du régime de faveur prévu aux articles L.213-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle.
Par conséquent, la société Comotion n’était pas le producteur des chansons « Étienne » et « Un espoir » au sens de l’article précité. Elle n’a donc pu transmettre ces droits à la société EMI.
Faits de l’espèce mis a part, comment doit-on interpréter ce revirement de jurisprudence ? Les régimes de producteur d’œuvre audiovisuelle et de producteur de vidéogramme, qui répondent à des problématiques identiques, connaitront ils des bouleversements similaires ?
En la situation actuelle, il convient d’agir prudemment et de rechercher avec précaution l’existence du droit de producteur avant d’agir sur le terrain de la contrefaçon.
Source :
Arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 12 janvier 2011.

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