Produire en justice l’image d’une personne, à titre de preuve, ne constitue pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée ni au droit à l’image de la personne, lorsque son identification est impossible. Telle est en substance l’interprétation de la Cour de Cassation dans son arrêt du 10 septembre 2014.
En l’espèce, ont été produites devant le tribunal des pièces défavorables d’une procédure pénale non encore achevée contre une dame par la partie adverse. Ces pièces étaient constituées de photographies. Arguant d’une atteinte à sa présomption d’innocence, à sa vie privée et à son image, cette dame a assigné son adversaire.
Le défendeur a été condamné par les juges du fond, au regard de la violation de la présomption d’innocence. Néanmoins, les griefs allégués d’atteinte à la vie privée et au droit à l’image ont été écartés par les juges. Un pourvoi en cassation a donc été formé.
Dans un arrêt du 10 septembre 2014, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi après avoir relevé que l’atteinte alléguée n’était pas disproportionnée lorsqu’elle se réduisait à servir de preuve en justice. La haute juridiction a relevé, d’autre part, qu’aucune atteinte à son droit à l’image ne pouvait être retenue étant donné que la mauvaise qualité de la photographie rendait impossible son identification.
Le droit à la vie privée soumis au principe de proportion
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée… »: l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’homme et des libertés fondamentales rappelle ce principe.
La loi du 17 juillet 1990 a introduit dans le Code civil un article 9 qui précise : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent sans préjudice de la réparation du dommage subi prescrire toutes mesures telles que séquestres, saisies et autres, propres à empêcher ou à faire cesser une atteinte à la vie privée ; ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé ». Cette disposition s’accompagne de clauses répressives dans le Code pénal qui sanctionnent sévèrement les écoutes ainsi que l’enregistrement des paroles et des images.
Ces textes n’en donnent pas de définition précise. Cette charge est donc naturellement revenue à la jurisprudence qui s’est néanmoins bien gardée de le faire. Elle en a simplement cerné les contours.
Au fil des jugements des jalons ont été posés : le droit pour une personne d’être libre de mener sa propre existence avec le minimum d’ingérences extérieures, le droit à la protection du nom, de l’image, de la voix, de l’intimité, de l’honneur et de la réputation, de l’oubli…
Le critère majeur retenu est celui de la pertinence de l’information par rapport au débat d’intérêt public. En l’espèce, les magistrats ont considéré que l’atteinte alléguée n’était pas disproportionnée lorsqu’elle se réduisait à servir de preuve en justice.
Le droit à l’image est donc supplanté par le droit de se défendre.
Néanmoins, dans le cas d’espèce, les pièces fournies ont été déclarées irrecevables en vertu du principe fondamental de la présomption d’innocence, ces pièces étant tirées d’une procédure pénale non achevée.
Le droit à l’image soumis à la limite de l’identification
La personne dont l’image est en cause peut agir pour s’opposer à l’utilisation de son image en vertu de l’article 9 du Code civil consacrant le droit au respect de vie privée. Il faut toutefois pour cela que la preuve de l’existence d’un préjudice constitutif d’une atteinte à la vie privée soit faite.
Concernant le dommage, il est généralement constitué par une atteinte morale, un préjudice moral. Son appréciation va déterminer en grande partie le montant des dommages et intérêts et la peine éventuellement infligée.
Il est donc tout à fait possible de reproduire et diffuser une image prise dans un lieu public à la condition que celle-ci ne présente pas un cadrage trop restrictif ou n’isole pas une personne la rendant facilement reconnaissable.
Ce point amène à préciser que le risque juridique est essentiellement lié à la diffusion, la publication, la reproduction ou la commercialisation de l’image sans l’accord explicite de la personne.
En l’espèce, aucune atteinte au droit à l’image n’a été retenue compte-tenu de la mauvaise qualité de l’image rendant, selon les magistrats, impossible l’identification de la personne représentée.
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