01 56 43 68 80

6, rue de Saint-Petersbourg, 75008 Paris

Tabac et diffusion publicitaire

Logo HAAS 2022

La Cour Européenne des Droits de l’Homme dans deux décisions en date du 5 mars 2009 a apporté une nouvelle pierre à l’édifice de la réglementation de la publicité. Dans ces deux arrêts, en effet, les juges ont estimé que « les médias audiovisuels et les médias de presse écrite et les ne sont pas placés dans des situations analogues et comparables ». Cela justifie donc la différence de régime concernant la publicité en faveur des produits tabagiques.
Pour mémoire, le code de la santé public prohibe, aux articles L.3511-3 et suivants, la propagande ou publicité en faveur du tabac. Des exceptions sont posées, l’une d’elle, la plus importante en termes de visibilité par le public, est énoncée à l’article L.3511-5 du code de la santé publique. Il y est prévu que « la retransmission des compétitions de sport mécanique qui se déroulent dans des pays où la publicité pour le tabac est autorisée, peut être assurée par les chaînes de télévision. »
La cour de cassation dans un arrêt du 14 mai 2008 a ajouté une nouvelle exigence : « la diffusion en temps réel ou dans des situations proches » de l’événement de sport mécanique.
Ainsi, force est de constater dans ce cas, que ce n’est pas le support lui-même qui importe mais l’existence ou non d’une possibilité technique de flouter ou de procéder par une autre technique au retrait ou à la dissimulation de l’affichage promouvant le tabac.
Il ne reste plus qu’à appliquer ce critère à différents services que l’on trouve sur internet. Dans le cadre de cette étude, seules seront envisagées trois situations : la catch-up tv, les web tv, les plateformes de diffusion de vidéos en streaming fournies par les internautes eux-mêmes.
Afin de poursuivre cette étude, il convient dans un premier temps de s’accorder sur la définition d’une chaîne de télévision. En effet, aucun texte ne définit la chaîne de télévision même si l’expression est utilisée dans plusieurs lois et décrets.
Cependant, on peut raisonnablement penser que la chaîne de télévision doit s’entendre de toute société entreprise assurant un service de télévision. Or la loi du 30 septembre 1986 définit dans son article 2 ce service comme « tout service de communication au public par voie électronique destiné à être reçu simultanément par l’ensemble du public ou par une catégorie de public et dont le programme principal est composé d’une suite ordonnée d’émissions comportant des images et des sons. »
Tabac et catch-up tv
La catch-up tv peut être définie comme « un service proposé par une chaîne de télévision offrant l’accès à titre gratuit ou onéreux, pendant une période limitée, au moment et à l’endroit choisi par le téléspectateur, à des œuvres ayant été récemment diffusée sur une chaîne de télévision. »
Le contenu transmis est donc un programme télévisé diffusé par une chaîne de télévision. En cela, s’il s’agit d’un sport mécanique, on peut penser à première vue, que l’on se trouve dans le cadre de l’exception prévue à l’article L3511-5 du Code de la santé publique. Mais deux éléments viennent contrecarrer cette apparente facilité de façade.
Le premier tient au délai écoulé entre l’événement sportif et sa diffusion en catch-up tv. Puisqu’il s’agit d’une rediffusion d’une émission télévisée, il existe forcément un délai important entre l’événement et sa diffusion sur la catch-up tv. Or, comme il a été vu précédemment l’exception prévue au code de la santé publique n’est valable que « pour une diffusion en temps réel ou dans des conditions proches. » Manifestement, ce n’est plus le cas en l’espèce.
Le second élément, plus discutable, empêchant l’application de l’exception tient à la définition d’un service de télévision. La loi de 1986, en effet, prévoit que la communication doit être reçue simultanément par l’ensemble du public. Il s’agit d’une communication point à multipoint. Or, dans le cas des catch-up tv, il s’agit d’une communication point à point. C’est la volonté du téléspectateur qui décide de la diffusion et du moment de celle-ci du programme télévisé.
Aussi on peut légitimement penser que l’interdiction de la propagande en faveur du tabac trouve pleinement à s’appliquer aux catch-up tv.
Tabac et web-tv
La Commission Générale de Terminologie et de Néologie dans un avis publié le 18 janvier 2005 définissait la web tv comme la « diffusion de programmes audiovisuels par l’internet ». Cette définition, un peu simpliste, peut être complétée en précisant notamment qu’entendue au sens stricte, la web-tv s’effectue par communication point à multipoint. Il s’agit de la diffusion d’une chaîne de télévision par l’internet.
Cette définition nous montre tout de suite dans quel cadre se situe cette communication. Il s’agit d’une chaîne de télévision qui diffuse via l’internet. Donc si cette chaîne diffuse un événement de sport mécanique en temps réel ou dans des conditions proches, elle peut bénéficier de l’exception prévue au code de la santé publique concernant la publicité pour le tabac.
Il est important de rappeler que cette analyse ne porte que sur les « vraies » web-tv. En effet, par abus de langage certains désignent les vidéos diffusées uniquement sur l’internet de web-tv. Alors que ces vidéos constituent des communications point à point et peuvent être visionnées par les internautes à n’importe quel moment.
Tabac et plateformes de diffusion de vidéos en streaming
Les plateformes de vidéo en streaming sont des sites internet sur lesquels les internautes eux-mêmes peuvent poster leurs vidéos. Les vidéos sont ensuite accessibles à tous en streaming.
Le régime de ce genre de plateformes est tout à fait incompatible avec l’exception pour la publicité en faveur du tabac pour trois raisons majeures. La plateforme n’est pas une chaîne de télévision, les vidéos diffusées ne le sont pas en direct ni dans des situations proches et enfin la communication ne se fait pas simultanément à l’ensemble du public.
Pourtant malgré toutes ces barrières à l’application de l’exception pour la publicité, on se rend compte que les propagandes directes ou indirectes pour le tabac sont pléthores sur ces plateformes. On ne compte plus les vidéos montrant des logos de fabricants de cigarettes ou celles vantant simplement les « qualités » du tabac.
Sanctions
Ce n’est pourtant pas anodin de procéder à de tels agissements puisque l’article L 3512-2 du code de la santé publique sanctionne de 100 000 euros d’amende l’infraction de publicité en faveur du tabac. La question reste à savoir qui sera sanctionné : la plateforme ou l’internaute qui publie la vidéo, voire les deux ?
Lire aussi :
Publicité pour le tabac et internet

ENVELOPPE NEWSLETTER copie

L'actu juridique numérique
du mardi matin.

Inscrivez-vous pour recevoir nos derniers articles, podcasts, vidéos et invitations aux webinars juridiques.

*Champs requis. Le cabinet HAAS Avocats traite votre adresse e-mail pour vous envoyer ses newsletters.

Vous pouvez accéder aux données vous concernant, les rectifier, demander leur effacement ou exercer votre droit à la limitation du traitement de vos données en nous contact à l’adresse mail suivante : dpo@haas-avocats.com