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Une seconde adresse d’accès à un site ne constitue pas une nouvelle publication

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L’article 65 de la loi la loi du 29 juillet 1881 prévoit pour les délits de presse, par dérogation à la règle de droit commun qui veut que les délits se prescrivent par trois ans, une prescription abrégée de trois mois. Et la jurisprudence considère ces infractions comme des infractions instantanées, faisant courir le délai de prescription à compter de la « première publication ».

Légitimement protecteur de la liberté d’expression, ce régime juridique de la loi du 29 juillet 1881 est bien adapté au cas des ouvrages, des journaux, et même des affiches.
Il devient en revanche déséquilibré et par trop défavorable aux victimes lorsque la diffamation ou l’injure s’opère par la voie d’Internet. Ce moyen de communication présente en effet une triple particularité :
– Il est à la disposition de tout un chacun, entraînant ainsi une augmentation exponentielle des informations diffusées ;
– La sphère de diffusion des messages dont il est le vecteur est considérable ;
– La durée de diffusion de ces messages n’a d’autres limites que celle que lui assigne leur émetteur. Elle devient, potentiellement, indéfinie.
Il apparaît ainsi clairement que, par-delà la notion générique de « publication », la durée d’impact d’un message mis en ligne est sans commune mesure avec celle d’un livre, d’un journal, d’une affiche ou d’une émission de télévision. Le délai de trois mois donné au particulier victime d’une diffamation, aux professions en butte à des injures ou à une incitation à la violence devient dérisoire dès lors que l’infraction est commise sur Internet.

Le 6 janvier 2009, la Cour de cassation a cassé et annulé les arrêts de la cour d’appel de Paris des 29 janvier 2004 et 26 mai 2005 qui avaient conclu qu’il n’y avait pas prescription de l’action et avait condamné M.C. à une amende avec sursis pour injures et diffamation publiques raciales et provocation à la haine raciale ou à la violence raciale publiées sur un site Internet.

En l’espèce, pour augmenter l’audience de son site consultable à l’adresse « Altern.costes.org », M.C. l’avait rendu accessible par un nouveau nom de domaine, « Costes.org ». Il s’agissait de créer une nouvelle porte d’entrée au site, sans qu’il y ait changement de contenu, de fournisseur d’hébergement ou de lieu de stockage des informations. La Haute juridiction judiciaire a estimé que la simple adjonction d’une seconde adresse Internet pour accéder à un site existant « ne saurait caractériser un nouvel acte de publication de textes figurant déjà à l’identique sur ce site ». Elle a alors constaté l’extinction de l’action publique et a dit n’y avoir pas lieu à renvoi.
Par ailleurs, il convient de remarquer que s’agissant du délai de prescription pour les délits de diffamation et d’injure commis sur Internet que, le 4 novembre 2008, le Sénat a adopté une proposition de loi qui fait passer ce délai de trois mois à un an.
Cette proposition de loi tend à résoudre un problème bien identifié, mais non résolu, tout en prenant en compte la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui exclut une remise en cause du point de départ du délai de prescription de l’action publique et de l’action civile résultant des infractions visées par la loi du 29 juillet 1881.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
Le dernier alinéa de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« Le délai de prescription prévu au premier alinéa est porté à un an si les infractions ont été commises par l’intermédiaire d’un service de communication au public en ligne, sauf en cas de reproduction du contenu d’une publication diffusée sur support papier. »

Elle prévoit donc simplement un allongement de trois mois à un an de ce délai si les infractions ont été commises par l’intermédiaire d’un service de communication au public en ligne.
Est toutefois exclu de cet allongement du délai de prescription, le cas dans lequel le message diffusé en ligne n’est que l’exacte reproduction d’un article diffusé par la presse écrite, à l’instar de ce qui avait été voté en 2004 dans le cadre de l’examen de la loi sur la confiance de l’économie numérique.
À défaut en effet, comme presque tous les journaux de la presse écrite disposent désormais d’une édition en ligne, la réforme reviendrait en pratique à porter de trois mois à un an la prescription des délits de presse, ce qui serait excessif et mal compris par les entreprises de presse.
Références :
Cour de cassation, chambre criminelle, 6 janvier 2009 (pourvoi n° 05-83.491) – cassation sans renvoi contre cour d’appel de Paris des 29 janvier 2004 et 26 mai 2005) – Voir le document

Proposition de loi tendant à allonger le délai de prescription de l’action publique pour les diffamations, injures ou provocations commises par l’intermédiaire d’Internet – Voir le document

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