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La jurisprudence « Google Adwords » s’applique aussi à Ebay

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La sociéte JM Weston a fait assigner les sociétés Ebay en contrefaçon de marque et parasitisme économique après avoir fait constaté que ces dernières utilisaient sa dénomination sociale et ses marques Weston et JM Weston sans son autorisation d’une part, pour faire apparaître des liens sponsorisés sur différents moteurs de recherche et d’autre part, en les proposant à la vente à titre de mot clé dans son système de référencement payant Adcommerce sur son site www.ebay.fr.

Absence d’atteinte à la fonction d’identification d’origine de la marque

Si la société JM Weston estime que cet usage sans son autorisation constitue une contrefaçon de marques au sens des articles L 713-2 et L 716-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, le Tribunal de Grande Instance de Paris en juge différemment en constatant que les annonces litigieuses du type « Chaussures pour hommes chaussures weston à des prix dingues. Achetez, vendez ! ebay.fr » renvoyaient sur les pages du site ebay.fr présentant des annonces de vente de chaussures Weston, dont il n’est pas établi ni allégué qu’il s’agisse de contrefaçons.

Le Tribunal considère ainsi que l’usage fait des marques Weston et JM Weston par la société Ebay, en sa qualité d’exploitante de place de marché en ligne et d’annonceur est tout à fait normal, dès lors qu’il a vocation à promouvoir la vente de chaussures Weston sur cette place de marché.

La fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur l’identité d’origine du produit marqué, en lui permettant de distinguer ce produit de ceux qui ont une autre provenance n’est pas atteinte, selon le Tribunal, dès lors que les annonces en cause permettent à l’internaute de savoir que les produits par les annonces proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou au contraire d’un tiers.

En effet, le tribunal constate que les annonces litigieuses se distinguent nettement des résultats dits “naturels”, sous titres tels que « Liens sponsorisés » « liens commerciaux » ou « Annonces », et identifient clairement leur annonceur Ebay, ainsi que les produits marqués « Weston » mis en vente sur sa place de marché.

Or, selon lui, les internautes normalement informés et raisonnablement attentifs ont pris l’habitude d’effectuer des recherches sur internet et de faire la distinction entre les résultats dits « naturels » et ceux qui sont à caractère publicitaire et sont sensés savoir que le site www.ebay.fr ne relève pas du réseau officiel de distribution de la société Weston mais constitue une place de marché distincte permettant à des particuliers et professionnels de revendre et/ou d’acheter différents produits dont des chaussures Weston qui ont été initialement fabriquées et mises sur le marché par la société Weston dans son réseau commercial.

Absence d’atteinte à la marque notoire

Pour trancher la demande relative à l’atteinte à la marque notoire de la société JM Weston, le Tribunal se réfère à la solution dégagée par la CJUE dans son arrêt Interflora / Marks & Spencer du 22 septembre qui a dit pour droit que :

« le titulaire d’une marque renommée est habilité à interdire à un concurrent de faire de la publicité à partir d’un mot clé correspondant à cette marque que ce concurrent a, sans le consentement dudit titulaire, sélectionné dans le cadre d’un service de référencement sur internet, lorsque ledit concurrent tire ainsi un profit indû du caractère distinctif ou de la renommée de la marque (parasitisme) ou lorsque ladite publicité porte préjudice à ce caractère distinctif (dilution) ou à cette renommée (ternissement).

Une publicité à partir d’un tel mot clé porte préjudice au caractère distinctif de la marque renommée (dilution), notamment si elle contribue à une dénaturation de cette marque en terme générique.

En revanche, le titulaire d’une marque renommée n‘est pas habilité à interdire des publicités affichées par des concurrents à partir de mots clés correspondant à cette marque et proposant, sans offrir une simple imitation des produits ou des services du titulaire de ladite marque, sans causer une dilution ou un ternissement et sans au demeurant porter atteinte aux fonctions de la marque renommée, une alternative par rapport aux produits ou aux services du titulaire de celle-ci ».

En l’espèce, le Tribunal considère que les annonces litigieuses qui ont pour but de promouvoir la vente des chaussures Weston sur le site eBay www.ebay.fr, permettent à l’internaute de savoir que des chaussures Weston de seconde main sont vendues sur ce site, ce qui constitue une alternative, dans une concurrence saine et loyale, par rapport aux services de la société Weston qui fabrique et commercialise des chaussures neuves directement dans ses boutiques.

Concurrence loyale

Pour les mêmes raisons, les demandes de la société JM WESTON pour concurrence déloyale et parasitaire et publicité trompeuse sont écartées ; le mot clé « Weston » étant utilisé dans un seul but d’information des internautes sur la présence de chaussures Weston d’occasion sur le site www.ebay.fr.

Le Tribunal juge ainsi de manière ferme que « la société Weston ne peut, sous couvert d’une action en concurrence déloyale, interdire à un autre opérateur économique sur internet permettant à des particuliers ou des professionnels de se mettre en relation pour vendre et/ou acheter leurs produits tels que des chaussures Weston, comme cela pouvait être le cas et peut toujours l’être sur une brocante ou un vide grenier ou dans un journal d’annonces de particuliers, de faire de la publicité afin d’informer le public de la possibilité de vendre ou d’acheter de tels produits sur son site internet, et ce dans des conditions exclusives de tout risque de confusion ».

Le statut d’hébergeur d’Ebay eu égard à son service de référencement payant

Enfin, il était fait grief à la société Ebay d’avoir proposé à la vente dans ce système le terme « Weston », générant l’apparition d’annonces redirigeant les internautes vers des sites concurrents de « Weston ».

La société Ebay se voit accorder le bénéfice de la jurisprudence « Google Adwords » établie par la CJUE dans ses arrêts du 23 mars 2010 au titre de son service de référencement payant Adcommerce permettant aux opérateurs économiques de réserver des mots clés pour faire apparaître des annonces promotionnelles sur le site www.ebay.fr.

En effet, le Tribunal constate que l’usage de la marque « WESTON » par la société EBAY dans le cadre de son service de référencement payant ne caractérise pas un usage de ladite marque dans la vie des affaires, et ne peut donc être constitutive de contrefaçon de marque.

La responsabilité de la société Ebay est donc écartée à ce titre, dès lors qu’elle ne joue pas un rôle actif dans la rédaction des annonces et qu’elle bénéficie donc du statut d’ « hébergeur »; peu importe que le service de référencement soit payant, que la société Ebay détermine l’endroit où sont placées les publicités, qu’elle puisse en modifier le format.

Conclusion :

La société Ebay est un annonceur comme un autre et se voit appliquer la jurisprudence « Google Adwords » telle qu’édictée par les arrêts de la CJUE le 23 mars 2012…

Cette jurisprudence confirme que les marques désireuses de s’assurer une visibilité optimale sur les principaux moteurs de recherche et places du marché du Web doivent désormais compter avec une jurisprudence qui leur est défavorable et qui fait la part belle au libre jeu de la concurrence.

Le référencement sur Internet doit donc faire l’objet de stratégies juridico-marketing de plus en plus complexes.

Source :

A propos de TGI Paris, 26 juin 2012

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