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Sites « parking » : nouvelle sanction des courtiers en noms de domaine

parking

A propos de CA Paris, 17 avril 2013 10/14270

La Cour d’appel de Paris vient de confirmer dans un arrêt du 17 avril 2013 sa jurisprudence antérieure en condamnant la société Sedo, es qualité de courtier en noms de domaine, pour la pratique dite de site parking consistant à proposer aux réservataires de noms de domaine d’afficher des liens publicitaires sur des pages html accessibles depuis ces noms de domaine.

Observons ici que la Cour d’appel de Paris avait déjà sanctionné à plusieurs reprises ce type de pratique (CA Paris, 7 mars 2007, Affaire « Hôtels Méridien » et CA Paris, 23 septembre 2009 (Pôle 5, Chambre 1), n°07/20549, JurisData 09-016310, Affaire « Euridile ») en qualifiant tout à la fois cette pratique de contrefaçon de marque et d’acte de concurrence déloyale, selon que le plaignant détenait des droits sur une marque identique ou une dénomination sociale ou bien encore un nom de domaine exploité également identiques. Malgré l’évolution de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne en matière de responsabilité des intermédiaires techniques (célèbre jurisprudence Google), la Cour d’appel de Paris refuse une nouvelle fois de faire droit au principal argument de la société Sedo sollicitant le bénéfice de la responsabilité limitée accordée aux hébergeurs de contenu, au motif qu’elle ne serait qu’un prestataire technique jouant un rôle purement passif dans la fourniture de ses services.

En l’espèce, la société Dreamnex, qui exerce son activité sous le nom commercial et la marque Sexy Avenue, notamment via les sites sexyavenue.com et sexyavenue.fr, a découvert que les noms de domaine sexyavenue.eu, sexyavenue.mobi, sexyavenue.biz et sexyavenue.info avaient été réservés par des tiers et qu’ils étaient proposés à la vente aux enchères via le site sedo.com tout en donnant accès à un contenu constitué de liens hypertextes publicitaires à destination de sites Internet concurrents. Afin de faire respecter ses droits et après des mises en demeure infructueuses, la société Dreamnex assigna les réservataires des noms de domaine litigieux ainsi que la société Sedo en contrefaçon de marque et usurpation de son nom commercial et de ses noms de domaine. Le Tribunal lui donne raison et condamne notamment la société Sedo à lui verser la somme de 60 000 euros en raison du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale commis à son encontre ; le Tribunal considérant que la société SEDO engageait sa responsabilité de droit commun et ne pouvait se prévaloir du statut d’hébergeur au sens de l’article 6- I-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 (LCEN) et de l’article 14 de la directive européenne 2000/31/CE.

C’est ce point que conteste la société SEDO en cause d’appel faisant valoir « que selon la jurisprudence communautaire désormais bien établie, l’appréciation du statut applicable doit se faire au regard de l’activité spécifiquement liée à la mise en ligne des données litigieuses et non au regard de l’objet général du site et que l’absence de connaissance ou de contrôle des données qu’il stocke est la condition déterminante de la neutralité du rôle joué par le prestataire technique et donc de sa qualité d’hébergeur ; qu’enfin cette absence de connaissance ou de contrôle résulte du caractère technique, automatique et passif du service » (sic).

La Cour d’appel de Paris, s’attachant à un examen détaillé des conditions générales d’utilisation des services du site sedo.com et des services proposés par la société Sedo en déduit que cette dernière ne se contente pas de jouer un rôle purement technique, automatique et passif, mais pointe au contraire le fait qu’elle « peut refuser l’inscription d’un nom de domaine par le client dans sa base de données ou supprimer à son gré et sans préavis ni devoir indiquer de motif, une inscription effectuée par un client dans sa base de données » (sic) et que le service dit de parking, présenté comme optionnel, serait en réalité systématiquement proposé.

La Cour souligne le fait que « l’affichage des annonces publicitaires est effectué par des opérateurs de moteurs de recherche, (…) grâce à la sélection par Sedo auprès de l’opérateur de mots clés correspondant au nom de domaine » et « qu’à aucun moment et en aucune manière l’utilisateur n’intervient dans la sélection et le placement de ces liens publicitaires sur la page parking du nom de domaine dont il est titulaire ». Enfin, selon ses propres conditions générales d’utilisation, Sedo serait habilitée à vérifier à tout moment que les mots-clés publicitaires sont bien conformes au nom de domaine concerné et pourrait modifier ceux qu’elle jugerait inadaptés sans même avoir à en informer le client.

La Cour en déduit que la société Sedo exerce « une action déterminante sur le contenu des pages parking (…), d’une part en intervenant dans le choix des mots-clés mis en ligne, (…) d’autre part en assurant la fourniture des liens publicitaires » et qu’elle ne peut donc se prévaloir de la qualité d’hébergeur au sens de la LCEN.

À ce titre, elle se voit notamment condamnée au titre de la contrefaçon de marque pour avoir permis l’affichage de liens hypertextes sur les pages parking à la saisie des noms de domaine litigieux redirigeant les internautes vers des produits et services similaires à ceux visés par l’enregistrement de la marque Sexy Avenue.

Selon la Cour, il s’agit bien d’un usage de la marque dans la vie des affaires dès lors que la société Sedo tire profit de cette activité. La frontière avec l’usage fait des marques par le moteur de recherche Google dans son système de régie publicitaire Google Adwords qui a été jugé comme ne pouvant pas constituer un acte de contrefaçon de marque est ténue et peut faire débat.

La condamnation financière est une nouvelle fois lourde puisque la société Dreamnex se voit allouer la somme de 75 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi.

Cela devrait faire évoluer les pratiques en la matière et les victimes de sites parking ne peuvent que s’en réjouir.

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