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Nul n’est censé ignorer la loi, même un cybermarchand.

medecin

Les cybermarchands sont censés connaître la Loi et les produits qu’ils vendent. C’est ce que vient de rappeler avec force la Chambre criminelle de la Cour de Cassation dans deux arrêts distincts des 20 septembre et 4 octobre 2011.

Les cybermarchands, préalablement à la commercialisation de produits sur leur boutique en ligne, doivent donc impérativement se renseigner sur le cadre juridique applicable à leur activité et connaître les règles applicables aux produits qu’ils souhaitent vendre afin de se conformer à la législation et à la réglementation en vigueur.

En leur qualité de professionnel, ils doivent également s’assurer de la conformité des produits qu’ils proposent à la vente avec la réglementation relative à la protection des consommateurs.

Décryptage :

1. L’erreur de droit pour échapper à sa responsabilité pénale : une exonération de responsabilité non retenue par la Cour de cassation.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 octobre 2011, le Conseil National de l’Ordre des Médecins a porté plainte avec constitution de partie civile contre une société proposant à la vente des médicaments dont la vente est réservée aux pharmaciens.

Dans cette affaire, la société contrevenante fut mise en examen pour exercice illégal profession de pharmacien, délit prévu et puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende par l’article L. 4223-1 du Code de la Santé Publique.

Le Juge d’instruction rendit néanmoins une ordonnance de non-lieu (confirmée en cause d’appel par la Chambre de l’instruction) au profit de la société poursuivie, en faisant bénéficier celle-ci des dispositions de l’article 121-3 du Code pénal qui énoncent :

« N’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir l’acte ».

En effet, en l’espèce, la société mise en examen avait fait valoir l’erreur de droit commise sur la nature des produits du fait de leur présentation comme « suppléments nutritionnels » et « aliment complémentaire » dans le « Dictionnaire des médicaments vétérinaires 2005 ».

Considérant que la Chambre de l’Instruction n’avait pas justifié sa décision en ne répondant pas notamment à l’argument de la plaignante selon lequel la mise en examen n’aurait pas démontré l’existence d’une erreur invincible de droit lui laissant croire qu’elle pouvait vendre les produits litigieux ; cette dernière, en sa qualité de professionnel, devant se renseigner sur le caractère des produits commercialisés en justifiant de démarches autres que celles visant à consulter un dictionnaire de médicaments vétérinaires dépourvu de toute valeur juridique, la Cour de Cassation casse et annule l’arrêt de la Chambre de l’instruction.

Le cybermarchand devra donc justifier de démarches sérieuses pour s’assurer de la légalité de son activité de vente en ligne car il ne pourra pas se prévaloir d’une erreur de droit sans s’être au préalablement sérieusement renseigner.

2. L’obligation de connaître le caractère des produits mis en vente

Au-delà de connaître les règles de droit applicable à son commerce spécifique, le cybermarchand devra être vigilant quant à la qualité des produits qu’il mettra en vente sur son site web.

En effet, dans l’autre affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 septembre 2011, la gérante d’une société spécialisée dans la vente de luminaires avait fait l’objet de poursuites pénales pour tromperie, suite à un contrôle de la DGCCRF ayant révélé la non-conformité et la dangerosité de deux modèles de luminaires.

Article L. 212-1 du Code de la Consommation :

« Dès la première mise sur le marché, les produits doivent répondre aux prescriptions en vigueur relatives à la sécurité et à la santé des personnes, à la loyauté des transactions commerciales et à la protection des consommateurs.
Le responsable de la première mise sur le marché d’un produit est donc tenu de vérifier que celui-ci est conforme aux prescriptions en vigueur.
A la demande des agents habilités pour appliquer le présent livre, il est tenu de justifier les vérifications et contrôles effectués ».

Article L213-1 du Code de la Consommation :

« Sera puni d’un emprisonnement de deux ans au plus et d’une amende de 37 500 euros au plus ou de l’une de ces deux peines seulement quiconque, qu’il soit ou non partie au contrat, aura trompé ou tenté de tromper le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers :
1° Soit sur la nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de toutes marchandises ;
3° Soit sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à l’utilisation du produit, les contrôles effectués, les modes d’emploi ou les précautions à prendre. »

Cette dernière fut condamnée à une amende délictuelle de 10 000 euros. La gérante de la société contesta sa condamnation au motif qu’elle n’aurait pas eu l’intention de commettre le délit de tromperie pour lequel elle fut condamnée. Pour démontrer l’absence d’élément intentionnel du délit, elle fit valoir qu’elle s’était fiée à deux certificats de conformité émanant de laboratoires européens implantés en Chine, effectués à la demande de son fabricant chinois préalablement à l’importation des produits.

La Cour de Cassation confirme la condamnation estimant que la gérante de la société française qui avait mis sur le marché les produits importés avait l’obligation de vérifié la conformité des produits mis en vente ; ce qui imposait qu’elle fasse procéder elle-même à des tests de conformité, sans qu’elle ne puisse se prévaloir des rapports de conformité étrangers fournis par son fournisseur.

Conclusion :

Ces deux décisions rappellent aux cybermarchands deux des obligations essentielles qui pèsent sur eux :

  • Vérifier la légalité et la conformité de leur activité auprès de professionnels du droit
  • Vérifier la conformité et la qualité des produits mis en vente

A défaut de telles vérifications, leur responsabilité pénale peut être engagée sans qu’ils ne puissent se prévaloir utilement d’erreur de droit et d’absence d’intention pénale…
Nul n’est censé ignorer la loi !

Source :

A propos de Cass. Crim.20 septembre 2011, Pourvoi n°11-81.326 et Cass. Crim. 4 octobre 2011, Pourvoi n°11-88-157

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