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Avantage de la marque par rapport au nom de domaine

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A propos de CJUE, 21 décembre 2016, Aff. C-654/16

La CJUE dit pour droit qu’ « au cours de la période de cinq ans qui suit l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, son titulaire peut, en cas de risque de confusion, interdire aux tiers de faire usage, dans la vie des affaires, d’un signe identique ou similaire à sa marque pour tous les produits et les services identiques ou similaires à ceux pour lesquels cette marque a été enregistrée, sans devoir démontrer un usage sérieux de ladite marque pour ces produits ou ces services ».

Dans cette affaire, la CJUE a été saisie d’une demande de décision préjudicielle qui porte sur l’interprétation des articles 9§1b, 15 §1 et 51 du règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque de l’Union Européenne, à l’initiative d’une société suédoise accusée de violer les droits exclusifs du titulaire d’une marque européenne.

Ces articles énoncent que :

  • la marque européenne confère à son titulaire un droit exclusif permettant à ce dernier d’interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec sa marque et de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par sa marque et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.
  • si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque européenne n’a pas fait l’objet par son titulaire d’un usage sérieux dans l’Union Européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, son titulaire encourt la déchéance de ses droits sur cette marque (cette déchéance sollicitée par un tiers soit devant l’EUIPO soit dans le cadre d’une demande reconventionnelle formulée dans le cadre d’une action en contrefaçon de marque).

En l’espèce, une société exerçant une activité dans les domaines de l’assurance, des placements de fonds et de la Banque, titulaire d’une marque européenne enregistrée le 4 janvier 2008 pour désigner différents services relevant des classes 36 et 37, dont différents services en lien avec l’immobilier et la construction, a engagé une action en contrefaçon de marque à l’encontre d’une société spécialisée dans la fabrication et l’assemblage de maisons en bois qui avait enregistré en 2009 et utilisé jusqu’en 2011 une marque similaire en classe 19 pour désigner des « matériaux de construction non métalliques ; tuyaux rigides non métalliques pour la construction ; asphalte, poix et bitume ; constructions transportables non métalliques ; monuments non métalliques ».

Si le risque de confusion a été retenu entre les signes et les produits et services par les juges de première instance, celui-ci ne fut pas retenu en appel dès lors que les magistrats considérèrent que les produits et services à comparer n’étaient pas ceux formellement désignés dans l’enregistrement de la marque antérieure mais ceux effectivement exploités par le titulaire de cette marque.

La haute juridiction suédoise, saisie du dossier, a donc posé la question préjudicielle suivant à la CJUE : « le fait que la marque européenne n’ait pas fait l’objet par le titulaire, au cours d’une période comprise dans le délai de cinq ans qui suit l’enregistrement, d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services visés par l’enregistrement a-t-il une incidence sur le droit exclusif du titulaire ? ».

LA CJUE, sans surprise, répond par la négative en s’appuyant sur la lecture combinée de l’article 9 et des articles 15 et 51 du Règlement précité interprétés a contrario.

En effet, si ces textes aménagent une procédure en déchéance des droits et conditionnent le maintien des droits liés à la marque européenne à la condition qu’elle soit effectivement utilisée au-delà de cinq ans suivant son enregistrement, il ressort de ces textes que le titulaire d’une marque européenne bénéficie en revanche d’une période de cinq ans suivant l’enregistrement de sa marque pour la mettre en exploitation sans qu’il ait à justifier d’un usage réel de sa marque  pour l’ensemble des produits et services visés dans son enregistrement.

En conséquence, le titulaire d’une marque européenne (ou française, car les règles sont les mêmes) peut opposer aux tiers les droits qu’il détient du seul fait de l’enregistrement de sa marque pour l’ensemble des produits et services visés par son enregistrement, sans avoir à justifier d’un quelconque usage de sa marque, et ce pendant les cinq années qui suivent son enregistrement.

Ce n’est que passé ce délai de cinq qu’il encourra la déchéance de ses droits sur sa marque pour les produits et services dont il ne justifierait pas faire un usage sérieux.

Cet arrêt illustre l’importance et la force d’une marque enregistrée par rapport aux autres signes distinctifs pour lesquels l’usage effectif est toujours pris en compte dans le risque de confusion qui pourrait exister avec un signe similaire utilisé postérieurement par un tiers dans la vie des affaires.

En particulier, cette force doit être prise en compte dans tout projet digital car, contrairement à la marque, la réservation d’un nom de domaine ne confère à son titulaire aucun droit opposable aux tiers, avant que celui-ci ne soit utilisé de manière effective.

Illustration :

Une personne X réserve un nom de domaine HAAS.COM le 1er janvier 2017 pour lancer un site de vente de vêtements en ligne. Une personne Y dépose une marque HAAS le 15 janvier 2017 en visant différents produits vestimentaires en classe 5 et des services de vente de vêtement en classe 35. La personne X lance son site Internet le 1er mars 2017. C’est bien la personne Y qui aura des droits opposables à la personne X, et non l’inverse.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à contacter le Cabinet HAAS Avocats ici.

 

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