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L’Autorité de la concurrence appelle à plus de transparence dans la publicité numérique

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Par Gérard HAAS et Anne-Charlotte ANDRIEUX
A l’heure où Tim Berners-Lee, créateur du World Wide Web met en garde contre la concentration des pouvoirs entre les mains des grandes plateformes de l’Internet[1], l’autorité française de la concurrence nous livre son analyse du succès retentissant de la publicité numérique.

  1. Le succès de la publicité numérique 

Avec une valeur en France de 4,1 milliards d’euros en 2017 selon l’observatoire de l’e-pub présenté par le Syndicat des régies internet (SRI) le 25 janvier dernier [2], la publicité numérique est devenue le média le plus prisé des annonceurs, devant la télévision. En la matière, la France se situe au 3ème rang européen derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne.  Cette croissance du secteur (12% en 2017) est principalement portée par la généralisation des technologies programmatiques, et ce en particulier grâce à la vidéo, aux réseaux sociaux et à la vente d’espaces publicitaires par le biais de plateformes logicielles. Ainsi le secteur online a pesé pour 29,6% des investissements média en 2016, contre 28,1% pour la télévision.
Désormais, la publicité de search (Search Engine Advertising), c’est-à-dire les pratiques de référencement qui permettent à des sites web d’améliorer leur visibilité dans les pages de résultats proposées par les moteurs de recherche, représente 68% du marché digital français tandis que le display classique, hors réseaux sociaux, ne pèse plus que 10%.
Cependant, l’incroyable croissance de l’E-pub en France semble cacher une fracture plus profonde, entre les géants de l’Internet tel que Facebook et Google d’un côté, et les autres acteurs du marché de l’autre. En effet, c’est également sur les réseaux sociaux que l’on observe la majeure partie de la croissance de la publicité programmatique qui consiste en un processus allant de la sélection automatique des emplacements publicitaires à l’optimisation des prix d’achat en temps réel.
Ce rapport de force semble encore plus poignant lorsqu’on s’intéresse au mobile où la part de marché du search et des réseaux sociaux s’élève désormais à plus de 90%. A cet égard, Sophie Poncin patronne du SRI regrette les politiques de « dumping » pratiquées par les plateformes dominantes et met en garde les annonceurs sur les risques que représenteraient une trop forte inféodation aux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft).

  1. L’alarmante prédominance de Google et Facebook

Dans ce ­contexte, l’Autorité de la concurrence a publié, mardi 6 mars 2018, un nouvel avis sur la publicité en ligne. En 2010, l’Autorité de la concurrence avait déjà réalisé une étude de la publicité dite de search liée aux moteurs de recherche. Dans le prolongement de l’étude conjointe réalisée en mai 2016 avec son homologue allemand sur les données et leurs enjeux pour l’application du droit de la concurrence, l’Autorité s’intéresse cette fois-ci à d’autres modes de publicité en ligne.
Elle dresse tout d’abord un état des lieux de la publicité sur 125 pages en s’intéressant plus particulièrement à la publicité dite de « display » laquelle comprend les pavés, les bannières et habillages intégrés au contenu d’un site pour être vus des internautes.  A la suite de ce constat, elle livre un diagnostic alertant sur la prédominance de Facebook et Google notamment grâce aux données que leur apportent les internautes en utilisant leurs services. Selon l’Autorité, les deux géants du web génèrent la majorité des revenus du secteur au niveau français comme à international et ce notamment parce qu’ils disposent d’avantages concurrentiels significatifs : forte popularité auprès des internautes, présence dans le secteur de l’édition et de l’intermédiation publicitaire, fortes capacités de ciblages publicitaires.
En effet, lors de la navigation, Facebook comme Google collectent un vaste ensemble de données : données clients, données de contact, données de navigation, données d’achat, données de géolocalisation, centres d’intérêt, données géographiques, sociodémographiques… Forte de la valeur des données collectées, Google avait déjà créé sa régie publicitaire « Google Adsense » laquelle permettait de monétiser des contenus web. Désormais ce nouveau service est complété par l’interface « Google Adwords » à partir de laquelle les annonceurs et les agences peuvent générer des campagnes de search et de display sur la base des services d’analyse de données proposées par la firme.
L’Autorité de la concurrence souligne alors que les acteurs prédominants de la publicité numérique ont recours à des pratiques anticoncurrentielles au détriment des acteurs les plus fragiles ne disposant pas de site leur permettant la collecte massive de données. Parmi ces pratiques sont notamment pointées du doigt des stratégies de couplage ou de vente liées, des effets de levier permettant aux acteurs prédominants de se développer sur d’autres marchés, ou encore de pratiques de traitement discriminatoires à l’encontre de certains éditeurs et intermédiaires du secteur.
Le gendarme français de la concurrence appelle à un cadre législatif mettant enfin en place la transparence dans le monde publicitaire et met en garde contre une protection de la vie privée qui, mal conçue, pourrait mettre à mal les acteurs français dans la farouche concurrence que leur opposent les géants américains. Suite à ce constat le rapporteur général annonce que les services de l’Autorité de la concurrence vont procéder à un examen préliminaire afin de déterminer s’il y a lieu d’ouvrir une ou plusieurs enquêtes contentieuses, puis met en garde les exécutifs français et européens sur les précautions à prendre dans l’application, d’ici quelques mois, des nouvelles règles de protection des données (Voir : RGPD [3]).
 
[1] http://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/03/12/tim-berners-lee-le-pere-du-web-appelle-a-reguler-les-grandes-plates-formes_5269595_4408996.html
[2] http://www.sri-france.org/etudes-et-chiffre-cles/observatoire-de-le-pub-sri/)
[3] https://www.haas-avocats.com/livres-blancs-rgpd/

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