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Les apports de la loi de ratification du 20 avril 2018 sur les effets du contrat

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La loi adoptée le 20 avril 2018 par le Parlement n’entraine pas seulement la ratification de l’ordonnance du 10 février 2016 réformant le droit des contrats, elle y apporte également quelques clarifications. Certaines dispositions n’étant pas seulement interprétatives, l’entrée en vigueur de la loi au 1er octobre 2018 aura pour effet la mise en place de trois droits applicables.
Ainsi, s’agissant des nouvelles dispositions sur les effets du contrat, s’appliqueront aux contrats conclus au 1er octobre 2018 une exception au principe de révision du contrat en cas d’imprévision et les modifications de l’article ayant trait à la réduction du prix en cas d’exécution imparfaite.
Les dispositions interprétatives portant sur la fixation unilatérale du prix et sur l’exécution forcée en nature étant d’application immédiate s’appliqueront aux contrats conclus au 1er octobre 2016 soumis aux règles « intermédiaires » de l’ordonnance du 10 février 2016.
 
Les dispositions d’application immédiate
S’agissant de la fixation unilatérale du prix, ce mécanisme prétorien a été consacré par la réforme de 2016 pour deux types de contrats. Les contrats-cadre à l’article 1164 du Code civil et les contrats de prestation de service à l’article 1165. Contrairement au premier, les dispositions du second article sont supplétives. Ainsi, faute d’accord entre les parties, le prestataire pourra fixer unilatéralement le prix de la prestation. En raison de ce pouvoir unilatéral accordé à une des parties, il s’agit de se prémunir contre l’abus de droit. Ainsi l’ordonnance de 2016, au-delà de l’obligation du créancier de motiver sa décision en cas de contestation, prévoyait la possibilité d’une saisine du juge afin d’obtenir des dommages et intérêts en cas de fixation abusive du prix.
C’est dorénavant, en vertu de l’article 7 de la loi de ratification, pour l’obtention de dommages et intérêts et « le cas échéant » la résolution du contrat que le juge pourra être saisi par le débiteur. Cette rédaction, qui s’aligne avec les dispositions des contrats-cadre, semble indiquer qu’il reviendra au juge de déterminer quel type d’abus entrainera la résolution du contrat ou dommages et intérêts.
 
S’agissant de l’exécution forcée en nature, prenant le contrepied de l’ancien principe selon lequel « les obligations de faire et de ne pas faire se résolvent en dommages et intérêts », le nouvel article 1221 permettait au créancier d’une obligation d’en poursuivre l’exécution après mise en demeure. Seules deux exceptions pouvaient lui être opposées : l’impossibilité d’obtenir l’exécution – dans le cadre d’une obligation contrevenant aux bonnes mœurs par exemple – ou la disproportion manifeste entre le coût pour le débiteur et les intérêts du créancier. Ainsi, le débiteur ne peut se prévaloir du fait que l’exécution de l’obligation entrainerait un coût excessif pour se dégager de son obligation, encore faut-il que l’intérêt du créancier à voir l’obligation se réaliser soit moindre en proportion du coût engagé. Cette disposition protège ainsi le débiteur d’un moyen de « punition » que le créancier aurait à son encontre.
L’article 10 de la loi de ratification vient toutefois d’élargir le champ d’application de l’article 1221 en offrant la possibilité de se dégager de l’exécution forcée en cas de disproportion manifeste qu’aux débiteurs de bonne foi.
 
Les dispositions s’appliquant aux contrats en date du 1er octobre 2018
S’agissant de la révision du contrat en cas d’imprévision, dans un souci de rendre le droit français plus attractif aux contrats internationaux, le législateur a donné la possibilité au juge de réviser le contrat à l’article 1195 du Code civil. Ce texte supplétif s’applique si les parties n’en n’ont convenu autrement. Son application suppose la rencontre de quatre conditions : un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat qui entraine une exécution excessivement onéreuse pour une des parties qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque.
Cette révision, qui doit intervenir en cas de refus ou d’échec d’une renégociation du contrat, peut être initiée d’un commun accord ou à la demande d’une partie à défaut d’accord dans un délai raisonnable. Contrairement au droit international, elle concernait tous les contrats de droit commun. Seront, à partir du 1er octobre 2018, exclus du champ d’application de l’article 1195 les titres et instruments financiers à terme inscrits à l’article L.211-1 I à III du Code monétaire et financier.
 
S’agissant de la réduction du prix en cas d’exécution imparfaite, la réforme de 2016 a prévu pour le créancier d’une obligation mal exécutée la possibilité, après mise en demeure du débiteur, d’accepter cette obligation imparfaite et de solliciter une réduction proportionnelle du prix. Dans le cas où le créancier n’avait pas encore payé, il devait notifier sa décision au débiteur dans les meilleurs délais. Ainsi, et sans s’attarder sur la difficulté d’évaluer ce que constitue une « réduction proportionnelle », l’article 1223 prévoyait un droit de modification unilatérale du prix par le créancier.
L’article 10 de la loi de ratification modifie l’intégralité de l’article 1223 comme suit : « en cas d’exécution imparfaite de la prestation, le créancier peut, après mise en demeure et s’il n’a pas encore payé tout ou partie de la prestation, notifier dans les meilleurs délais au débiteur sa décision d’en réduire de manière proportionnelle le prix. L’acceptation par le débiteur de la décision de réduction de prix du créancier doit être rédigée par écrit.  Si le créancier a déjà payé, à défaut d’accord entre les parties, il peut demander au juge la réduction de prix ».
Ainsi le droit de modification du créancier est dorénavant conditionné à l’absence de paiement ou au paiement partiel du prix et semble être largement réduit par la nécessité d’une acceptation par le débiteur. De plus, en cas de paiement intégral du prix, la restitution proportionnelle d’une partie du prix devra faire l’objet d’un accord entre les parties ou d’une intervention judiciaire.
 
En dépit des clarifications apportées par la loi de ratification sur certains effets du contrat, il reviendra tout de même à la jurisprudence de préciser leurs contours.

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