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Les marques à l’assaut des stades et de leur histoire

Stade de foot

Santiago Bernabeu devra bientôt partager son patronyme avec « Abu Dhabi », le plus grand Emirat des Emirats Arabes Unis.

Abu Dhabi Bernabeu est en effet le nom qui sera prochainement donné au stade historique du Réal Madrid en vertu d’un contrat de naming conclu entre le célèbre club de football et le fonds d’investissement détenu par la famille royale d’Abu Dhabi.

Les contrats de naming ou nommage, construits sur le modèle des contrats de parrainage, sont assez peu répandus en France, même si certaines infrastructures sportives ont déjà sauté le pas : le MMArena au Mans, le Kindarena à Rouen, l’Allianz Riviera Stadium à Nice…

Cette pratique consiste, pour le propriétaire de l’équipement, à consentir à une entreprise privée le droit d’attribuer son nom ou celui de l’une de ses marques audit équipement, pour une période donnée (1) .

Or, ce phénomène soulève des réticences cristallisées au sein d’une question écrite à la ministre des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative posée par le député de l’Eure qui s’inquiète du fait que le naming ne s’étende à l’ensemble du domaine public entrainant le renommage des rues, des places par des entreprises privées (2).

En effet, contrairement à certains pays européens où le stade est la propriété du club sportif, en France, les stades sont regardés comme des dépendances domaniales depuis l’arrêt du Conseil d’Etat « Ville de Toulouse » (3) , même si certains clubs tels que l’Olympique Lyonnais songent à devenir propriétaires de leur propre stade.

En conséquence, le contrat de naming est très souvent conclu avec les collectivités territoriales. La question se pose donc de savoir quel est le régime juridique applicable au contrat de naming en France dans ce cas de figure.

Choisir et modifier la dénomination des espaces et lieux publics relève de la compétence des assemblées délibérantes locales dès lors qu’un intérêt général le justifie.

Du fait de l’inaliénabilité des dépendances du domaine public, le contrat de naming est nécessairement un contrat à durée déterminée, car le nom du stade fait partie des droits de propriété qui lui sont attachés. En outre, le contrat de naming comprend souvent d’autres opportunités pour l’entreprise pour promouvoir sa marque, telle que l’attribution de boutiques, de loges VIP ou d’espaces de restauration au sein de l’enceinte sportive, qui sont alors incluses dans l’autorisation d’occupation du domaine public.

Cette autorisation d’occupation du domaine public est par principe incessible. Aucune procédure particulière n’est prévue quant à la sélection des candidats à l’occupation (4) mais l’administration doit veiller à respecter les dispositions du droit de la concurrence (5).

En conséquence, lors de la négociation d’un tel contrat, les collectivités locales doivent notamment veiller à la conformité du projet à l’intérêt général et à ce que la dénomination ne soit pas source de troubles à l’ordre public ou ne vienne pas mettre en cause la neutralité du service public auquel ces équipements sont affectés.

Il est également nécessaire de prendre en compte la diversité de situation de l’ensemble des acteurs intervenant en relation avec l’équipement soit dans sa réalisation soit dans son exploitation (6).

La France est cependant en passe de rejoindre les autres pays d’Europe quant au mode de financement des stades. En effet, le grand stade de Lyon fait appel uniquement à des fonds privés. Etroitement associée au club sportif qui l’utilise, l’entreprise privée concluant le contrat de « naming » aura alors tout intérêt à prévoir la possibilité de rompre le contrat en cas de perte de popularité de ce club pour éviter que cette situation ne rejaillisse sur la réputation de sa propre image de marque.

A travers les contrats de naming, les marques peuvent bénéficier d’une visibilité accrue et d’un mode de promotion privilégié, alors que le propriétaire de l’équipement dispose d’une véritable opportunité de financement des coûts engendrés par la construction et la maintenance d’infrastructures lourdes. Mais, les différentes parties aux contrats auront intérêt à sécuriser et protéger leur position afin de prévenir toute difficulté en cours d’exécution du contrat.

[1] Dalloz AJCT Le naming des enceintes sportives, les nouveaux dieux du stade – Manuel Carius
[2] JO Assemblée nationale du 23 juillet 2013 14ème Législature Assemblée nationale Question écrite n° 24390 Ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative Sports – Football professionnel – Mécénat publicitaire. Lutte et prévention.
[3] Conseil d’Etat « Ville de Toulouse » 13 juillet 1961  req. n° 48792
[4] Conseil d’Etat, Section du contentieux, 3 décembre 2010, Ville de Paris et Association Paris Jean Bouin, nos 338272 et 338527
[5] Avis n° 04-A-19 du 21 octobre 2004 relatif à l’occupation du domaine public pour la distribution de journaux gratuits
[6] AJ Collectivités Territoriales 2012 p. 348 Les modes de réalisation et de gestion des équipements sportifs – Eric de Fenoyl,
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