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Droit des marques : les droits renforcés des collectivités territoriales

france

Hasard des calendriers, la Loi Hamon sur la consommation n°2014-344 du 17 mars 2014 qui renforce la protection des collectivités territoriales sur le nom, au regard notamment du droit des marques, a été promulguée quelques jours avant l’arrêt du 4 avril 2014 de la Cour d’appel de Paris qui a débouté la commune de Laguiole contre l’utilisation de son nom par des tiers à titre de marque. (Pour plus d’information : Cliquez ici)

Si cette loi n’est pas rétroactive (malheureusement pour la commune de Laguiole), elle doit néanmoins permettre aux collectivités territoriales de mieux maîtriser leur nom en leur offrant des outils efficaces de protection et de défense active pour éviter pareille mésaventure.

Surveillance de leur nom et droit d’opposition

Ainsi, la Loi Hamon précitée a créé les nouveaux articles L. 712-2-1 et L. 712-4 3° du Code de la propriété intellectuelle donnant les moyens effectifs aux collectivités territoriales de s’opposer à l’enregistrement de marques constituées de leur nom.

En effet, l’article L.712-2-1 du Code de la propriété intellectuelle donne la possibilité à toute collectivité territoriale, tout établissement public de coopération intercommunale, ainsi qu’aux conseils régionaux, à la collectivité territoriale de Corse et aux conseils généraux de demander à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) d’être alertés en cas de dépôt d’une demande d’enregistrement d’une marque contenant sa dénomination et/ou un nom de pays se situant sur leur territoire géographique.

En d’autres termes, la loi donne la possibilité aux collectivités territoriales de bénéficier d’un service de surveillance active de leur nom par l’INPI, dans des conditions qui restent à fixer par décret.

Une tel service de surveillance prend en effet toute son importance dès lors que la Loi ouvre aussi aux collectivités territoriales la possibilité (offerte jusqu’à présent aux seuls titulaires de droits sur des marques) de s’opposer auprès de l’INPI à toute demande d’enregistrement de marque portant atteinte à leur nom, à leur image ou à leur renommée, ou bien encore à l’indication géographique telle que définie par l’article L. 721-2, l’autre nouveauté de la Loi Hamon (cf. infra).

Les collectivités territoriales, à l’instar des propriétaires de marques antérieures, pourront donc efficacement défendre leurs droits en s’opposant en amont à l’enregistrement de marques portant atteinte à leur droit. Ceci constitue une avancée fondamentale dès lors que les procédures d’oppositions devant l’INPI sont beaucoup plus rapides et moins onéreuses que des actions judiciaires visant la nullité de marques enregistrées.

Création des indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux

L’autre apport de la loi Hamon est la création des indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux dont le régime juridique est défini par les articles L. 721-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
L’indication géographique est définie à l’article L. 721-2 du Code de la propriété intellectuelle :

« Constitue une indication géographique la dénomination d’une zone géographique ou d’un lieu déterminé servant à désigner un produit, autre qu’agricole, forestier, alimentaire ou de la mer, qui en est originaire et qui possède une qualité déterminée, une réputation ou d’autres caractéristiques qui peuvent être attribuées essentiellement à cette origine géographique ».

Il appartiendra au Directeur de l’INPI, sur présentation d’un organisme de défense et de gestion prévu par l’article L. 721-4 du même code, d’homologuer le cahier des charges fixant les conditions de production ou de transformation de ce produit, telles que la découpe, l’extraction ou la fabrication à respecter pour bénéficier de l’indication d’origine.

Ce dernier veillera notamment à ce que les opérations de production ou de transformation décrites dans le cahier des charges, ainsi que le périmètre de la zone ou du lieu, permettent de garantir que le produit concerné présente effectivement une qualité, une réputation ou d’autres caractéristiques qui peuvent être essentiellement attribuées à la zone géographique ou au lieu déterminé associés à l’indication géographique.

La défense et la gestion des produits bénéficiant d’une indication géographique seront assurées de manière indépendante par un organisme privé doté de la personnalité morale et animé par une mission d’intérêt général de préservation et de mise en valeur des territoires, des traditions locales et des savoir-faire ainsi que des produits qui en sont issus.

Tout opérateur, dès lors qu’il respecte le cahier des charges homologué, sera membre de droit de cet organisme de défense et de gestion, après en avoir fait la demande.

A contrario, seuls les opérateurs membres de l’organisme de défense et de gestion d’une indication géographique déterminée et inscrits sur la liste des opérateurs figurant dans le cahier des charges ou sur la liste des opérateurs actualisée et publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI) pourront se prévaloir de cette indication géographique.

L’existence d’indications d’origines permettra ainsi d’interdire :

– « toute utilisation commerciale directe ou indirecte d’une dénomination enregistrée à l’égard des produits non couverts par l’enregistrement, lorsque ces produits sont comparables à ceux enregistrés sous cette dénomination ou lorsque cette utilisation permet de profiter de la réputation de la dénomination protégée ;

– toute usurpation, imitation ou évocation, même si l’origine véritable des produits ou des services est indiquée ou si la dénomination protégée est traduite ou accompagnée d’une expression telle que  » genre ”,  » type ”,  » méthode ”,  » façon ”,  » imitation ” ou d’une expression similaire ;

– toute autre indication fausse ou fallacieuse quant à la provenance, l’origine, la nature ou les qualités essentielles du produit qui figure sur le conditionnement ou l’emballage, sur la publicité ou sur des documents afférents au produit concerné, ainsi que contre l’utilisation pour le conditionnement d’un récipient de nature à créer une impression erronée sur l’origine du produit »

– toute autre pratique susceptible d’induire le consommateur en erreur quant à la véritable origine du produit » (article L 721-8 du Code de la propriété intellectuelle).

En outre, l’utilisation ou la référence abusive à une indication d’origine sera sévèrement sanctionnée, au même titre que les AOC, puisqu’elles seront passibles d’une peine de de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 € (article L 115-16 du Code de la consommation).

L’indication géographique bénéficiera ainsi d’une forte protection contre tout usage indu ; ce d’autant plus que l’indication géographique, dont le cahier des charges aura été homologué, ne pourra « jamais être considérée comme présentant un caractère générique et tomber dans le domaine public » (article L 721-8 précité).

En attendant que les décrets d’application de cette loi soient pris et publiés, les collectivités territoriales doivent donc se tenir prêtes à bénéficier de ces nouveaux outils mis à leur disposition et dans l’intervalle, penser comme certaines d’entre elles, à déposer leur nom à titre de marque dans une stratégie de protection et de contrôle de l’utilisation de leur nom en adéquation avec l’image positive qu’ils souhaitent véhiculer autour d’elle.

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