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Les Bateaux-mouches aux confluents du dépôt frauduleux

bateau mouche

A propos de Cass. Com. 3 février 2015, Pourvoi n°13-18025

Le caractère frauduleux d’un dépôt de marque et la mauvaise foi qui anime le déposant peuvent s’apprécier au regard de circonstances factuelles postérieures au dépôt de la marque.

Dans cette affaire, le litige opposait le compagnon de la belle-fille du dirigeant de la société Compagnie des bateaux mouches à cette société, spécialisée dans le tourisme fluvial sur la Seine.

En effet, pendant plusieurs années entre 1985 et octobre 1993, le gendre a exercé dans l’enceinte de la société et en accord avec celle-ci, une activité de vente de films, photographies, cartes postales, guides touristiques, bibelots, souvenirs, tee-shirts et produits de bouche.

Le 20 avril 1993, il a déposé une première marque semi-figurative « bateaux mouches Paris Pont de l’Alma » qu’il a oublié de renouveler à son échéance, mais qu’il a redéposé à l’identique en 2003, en même temps qu’une marque verbale « Bateaux Mouches » pour désigner de multiples produits relevant des classes 9, 14, 18, 21, 25, 26, 28, 30 et 34, dont notamment des « appareils de vision de diapositives, porte-clés, broches, montres, photographies, cartes postales, dépliants, parapluies, porte-monnaie, sacs à main ».

Il s’est ainsi vu assigné par la société Compagnie des bateaux mouches en nullité de ses marques pour atteinte aux droits antérieurs de cette dernière sur sa dénomination sociale, son nom commercial et son enseigne et revendication de ses marques pour dépôts frauduleux.

La demande en nullité est rejetée au motif que comme l’a relevé la Cour d’appel de Paris, l’expression « bateaux mouches » pour désigner une activité de transport de voyageurs sur la Seine a été couramment utilisée depuis le milieu du XIXe siècle et que « le public concerné, à savoir celui des touristes visitant Paris et désireux de contempler ses monuments au fil d’une croisière sur la Seine, ne sera pas conduit à réserver exclusivement cette expression à l’entreprise qui l’a introduite dans sa dénomination sociale et se l’est appropriée comme enseigne ».

La Cour en conclut que la société Compagnie des bateaux mouches ne saurait valablement prétendre que sa dénomination sociale aurait acquis un caractère distinctif par l’usage. Elle ajoute que le risque de confusion avec les marques déposées est également exclu du fait de l’absence de similitudes entre les produits visés par lesdites marques et l’activité de la société Compagnie des bateaux mouches.

En revanche, la Cour de cassation censure le raisonnement tenu par la Cour d’appel de Paris pour débouter la société Compagnie des bateaux mouches de sa demande de revendication des marques litigieuses sur le fondement du dépôt frauduleux, au visa de l’article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle.

En effet, la Cour d’appel a jugé que la non-exploitation des marques, circonstance nécessairement postérieure au dépôt des marques, n’était pas de nature à établir la mauvaise foi de leur titulaire au jour du dépôt des marques litigieuses.

La Cour de Cassation censure ce raisonnement au motif que l’intention du déposant au moment du dépôt des demandes d’enregistrement est un élément subjectif qui doit être déterminé par référence à l’ensemble des facteurs pertinents propres au cas d’espèce, lesquels peuvent être postérieurs au dépôt.

Or, en l’espèce, il appartenait aux juges du fond de rechercher si, en déposant les marques composées de l’expression « bateaux mouches », dont il n’a jamais fait usage, le déposant, qui avait antérieurement été autorisé à exploiter une activité de vente d’articles de souvenirs et de bibeloterie dans les locaux de la société Compagnie des bateaux mouches, n’avait pas entendu faire obstacle au développement d’une telle activité par celle-ci, dont la dénomination sociale et le nom commercial comportaient la même expression.

La Cour de Cassation confirme donc que le caractère frauduleux d’un dépôt de marque peut donc s’apprécier au regard de circonstances factuelles postérieures à la date de dépôt de la marque litigieuse.

Une bonne nouvelle pour les victimes de ce détournement du droit des marques. En effet, c’est très souvent le comportement post-dépôt qui révèlera l’intention de nuire du déposant alors qu’au jour du dépôt, rien ne laisse présager que derrière des apparences légitimes se cache en réalité une inten

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