Par Stéphane ASTIER et Rachel RUIMY
Le droit de la consommation n’a cessé d’évoluer ces dernières années : Loi Hamon, Loi Macron, Loi pour une République Numérique du 7 octobre 2016. La présence des Conditions Générales de Vente et des mentions légales est désormais obligatoire sur un site internet e-commerce, tant dans les relations BtoC que BtoB.
Disposer d’un cadre juridique conforme permet de se prémunir contre d’éventuels litiges clients ou prévenir des contrôles toujours plus fréquents de la DGCCRF. Il s’agit, pour le cybermarchand, d’assurer une exploitation sereine de son activité retail tout en renforçant la confiance de ses clients & partenaires.
Ce document est donc stratégique : il s’agit du socle contractuel soutenant l’intégralité de l’activité digitale. Aussi, gare aux copier/coller sur des sites concurrents. Ceux-ci sont en effet sévèrement sanctionnés sur le terrain du parasitisme économique[1] par les Tribunaux et source par nature d’une forte insécurité juridique.
Dans un contexte économique globalisé où le e-commerce draine encore une croissance à deux chiffres, disposer de CGV à jour de la réglementation constitue au regard de ce seuls éléments un atout indispensable.
L’occasion d’un peu plus près à ce document.
Quelles sont les principales dispositions obligatoires à indiquer dans vos CGV BtoC ?
Les Conditions générales de vente sont le contrat en ligne par lequel le professionnel propose sur sa plateforme digitale la vente de biens ou la fourniture de services. Ces Conditions Générales de vente peuvent régir tant les relations entre un professionnel et un consommateur (BtoC), que les rapports entre deux professionnels (BtoB).
Les obligations juridiques lors de la rédaction de vos CGV ?
Lors de la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de service dans le cadre de relations BtoC, les obligations qui pèsent sur le professionnel sont plus lourdes que dans le cadre d’une relation BtoB.
Ainsi, les CGV doivent notamment contenir, de manière lisible et compréhensible la mention des informations suivantes :
- Les éléments à indiquer au titre de son obligation générale d’information précontractuelle à savoir notamment les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service et les modalités de paiement, les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités[2];
- La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation ainsi que ses coordonnées et l’adresse de son site internet[3] . En effet, l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1erjuillet 2016 puis complétée par le décret n°2016-884 du 29 juin 2016 relatif à la partie réglementaire du Code de la consommation prévoit désormais un processus de médiation obligatoire concernant les litiges de la consommation. Le Code de la consommation prévoit ainsi que le professionnel est tenu d’informer le client de la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation et de mettre en place un processus de médiation facultative au profit du consommateur, en indiquant les coordonnées du médiateur choisi.
- L’ensemble des informations relatives à l’existence et à l’exercice du droit de rétractation conformément à l’article L.221-5 et aux articles 221-18 et suivants du Code de la consommation. En effet, tout consommateur bénéficie d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités, à l’exception, le cas échéant, des frais de retour. Ainsi, devront notamment être expressément indiquées les informations suivantes : Le délai pour exercer ce droit, les conditions et modalités de l’exercice de ce droit, le formulaire type de rétractation, le coût de renvoi du bien. Le cas échéant, si le droit de rétractation fait l’objet d’une exception en application de l’article L.221-28 du Code de la consommation, il conviendra d’indiquer expressément que le consommateur ne bénéficie pas de ce droit. Le e-commerçant doit être vigilant à ces obligations en matière de droit de rétractation : lorsque ces informations n’ont pas été fournies au consommateur dans le respect de ces différentes obligations, le délai de rétractation est prolongé de douze mois[4] et le e-commerçant s’expose à une sanction administrative de 15.000 euros pour une personne physique et de 75.000 euros pour une personne morale[5].
- Dans le cadre de la vente de produits, les dispositions relatives aux garanties légales, c’est-à-dire à la garantie de conformité[6]et à la garantie des vices cachés[7] . Lorsque le professionnel propose une garantie commerciale, celle-ci doit faire l’objet d’un contrat écrit, avec certaines mentions obligatoires[8].
Par ailleurs, en cas de vente de produits ou de fourniture de services proposées à des consommateurs résidant à l’étranger, il conviendra au préalable de faire adapter vos CGV conformément aux règles de droit international privé. En effet, même si les CGV prévoient l’application de la loi française, un juge pourra écarter l’application de la loi choisie par le professionnel au profit des dispositions nationales du consommateur. Cette adaptation juridique au regard du droit applicable dans le pays cible est distincte de la traduction des CGV dans la langue du consommateur.
Vos CGV BtoB doivent-elles contenir certaines dispositions impératives ?
Les dispositions suivantes doivent impérativement être présentes dans vos CGV destinées à la vente de produits ou à la fourniture de services à des consommateurs :
- Les mêmes informations relevant de l’obligation générale d’information précontractuelle que dans le cadre des relations BtoC. En effet, ce devoir d’information qui était uniquement à la charge du professionnel dans ses relations avec un consommateur, a été renforcé depuis la loi Hamon. Désormais, conformément à l’article L.441-6 du Code de la consommation, tout professionnel devra communiquer ces informations à son client, professionnel ou consommateur ;
- Le barème des prix unitaires, les réductions de prix, ainsi que les conditions de règlement, en indiquant notamment les délais de paiement ainsi que les modalités régissant le retard de paiement (taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles et indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros), conformément à l’article L.441-6 du Code de commerce.
A l’inverse, tout e-commerçant doit désormais proscrire les clauses abusives dans ses CGV BtoB. Lors de relations entre un professionnel et un consommateur, le fait d’insérer des clauses abusives, c’est-à-dire des clauses créant au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, est expressément interdit par le Code de la consommation. Cette interdiction semble avoir été étendue aux relations BtoB. En effet, l’article 1171 du Code civil modifié par l’Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, prévoit que dans un contrat d’adhésion, toute clause qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
Pour rappel, contrairement au consommateur, l’acheteur professionnel sur un site internet ne pourra pas se prévaloir du droit de rétractation répondant aux articles L.221-18 et suivants du Code de la consommation. En effet, si la loi Hamon a étendu le droit de rétractation aux professionnels, trois conditions doivent être respectées :
- Le contrat doit être conclu hors établissement ;
- L’objet du contrat ne doit pas entrer dans le champ de l’activité principale du professionnel ;
- Le nombre de salariés employés par le professionnel doit être inférieur ou égal à cinq[9].
Que risquent les e-commerçants en cas d’utilisation de CGV non conformes ?
Si ces dispositions obligatoires sont communes aux CGV des e-commerçants, chaque contrat est personnalisé et doit être rédigé in concreto, pour la vente en ligne sur le site internet du professionnel. En reprenant les CGV d’une autre entreprise, le vendeur ne fournira pas une information claire, loyale et précise au consommateur et pourra être sanctionné. En outre, plagier des CGV peut constituer un acte de contrefaçon civilement ou pénalement réprimé, et/ou constituer un acte de concurrence déloyale et de parasitisme économique.
Par ailleurs, la répression des fraudes (DGCCRF) procède régulièrement à de nombreux contrôles des sites e-commerce que ce soit de manière spontanée ou suite à des plaintes de clients mécontents. Dans ce cas sont souvent sanctionnées les pratiques commerciales trompeuses (fausses promotions, défaut d’information du consommateur, etc.) identifiées directement sur le site e-commerce ou les clauses abusives des CGV.
Enfin, tout e-commerçant ne devra pas oublier de mentionner certaines dispositions relatives à la protection des données personnelles, dans ses CGV ou dans sa politique de confidentialité. La loi Informatique et Libertés, récemment modifiée par la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016, met différentes obligations à la charge du professionnel collectant des données à caractère personnel. Ainsi, le responsable de traitement devra par exemple indiquer aux utilisateurs les modalités relatives à leurs droits d’accès, de rectification, d’opposition mais également du droit de définir des directives relatives au sort de ses données à caractère personnel après sa mort. Avec l’entrée en vigueur le 25 mai prochain du Règlement européen sur la protection des données, de nombreuses entreprises vont devoir mettre à jour leurs CGV et Politiques de confidentialité devenues obsolètes quant à la collecte et au traitement des données client. En effet, le Règlement européen impose de nouvelles obligations présentées sur le site accessible à l’adresse suivante : https://www.avocat-rgpd.com/ .
Pour toute information complémentaire, n’hésitez pas à contacter le cabinet HAAS.
[1] Pour un exemple de décision (34Ke de condamnation): Cf. https://www.legalis.net/jurisprudences/tribunal-de-commerce-de-paris-15eme-chambre-jugement-du-14-mars-2016/
[2] Article L.111-1 du Code de la consommation
[3] Article L.111-1 et Article L.616-1 du Code de la consommation
[4] Article L.221-20 du Code de la consommation
[5] Article L.242-13 du Code de la consommation
[6] Articles L.217-4, L.217-5, L.217-7 et L.217-12 du Code de la consommation
[7] Articles 1641 et 1648 du Code civil
[8] Article L.217-5 du Code de la consommation : « La garantie commerciale s’entend de tout engagement contractuel d’un professionnel à l’égard du consommateur en vue du remboursement du prix d’achat, du remplacement ou de la réparation du bien ou de la prestation de tout autre service en relation avec le bien, en sus de ses obligations légales visant à garantir la conformité du bien. La garantie commerciale fait l’objet d’un contrat écrit, dont un exemplaire est remis à l’acheteur. Le contrat précise le contenu de la garantie, les modalités de sa mise en œuvre, son prix, sa durée, son étendue territoriale ainsi que le nom et l’adresse du garant. En outre, il mentionne de façon claire et précise que, indépendamment de la garantie commerciale, le vendeur reste tenu de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 217-4 à L. 217-12 et de celle relative aux défauts de la chose vendue, dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil. Les dispositions des articles L. 217-4, L. 217-5, L. 217-12 et L. 217-16 ainsi que l’article 1641 et le premier alinéa de l’article 1648 du code civil sont intégralement reproduites [reproduits] dans le contrat. En cas de non-respect de ces dispositions, la garantie demeure valable. L’acheteur est en droit de s’en prévaloir ».
[9] https://www.haas-avocats.com/ecommerce/lextension-droit-retractation-aux-professionnels/