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Droit des marques : voyage au cœur de la déchéance

droit des marques

Les actes d’usage postérieurs à la demande de déchéance, ainsi que les actes préparatoires à cet usage, fussent-ils antérieurs à la demande de déchéance, ne constituent pas un usage sérieux de la marque au sens de l’article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle et ne permettent donc pas à son titulaire d’être déchu de ses droits.

Dans l’affaire jugée par la Cour de Cassation le 19 mars 2013, la société connue sous le nom commercial Hermès parfums et titulaire de la marque française « Voyage » enregistrée le 30 juillet 1991 et renouvelée en 2001, pour désigner également des produits de parfumerie et de cosmétique relevant de la classe 3 a assigné une société concurrente pour voir prononcer la déchéance de ses droits sur la marque « Voyager » enregistrée le 10 janvier 1991 et dûment renouvelée en 2001 pour désigner des produits identiques et similaires en classe 3.

L’intérêt de la société Hermès parfums à engager une telle action résidait dans le fait qu’elle avait vocation à éliminer une marque qui était antérieure à la sienne et qui de facto générait pour elle une situation inconfortable, notamment en cas d’exploitation importante de cette marque par une société de son envergure qui acquerrait ou se ferait concéder une licence sur cette marque antérieure « Voyager ».

L’action engagée par la société Hermès parfums se fonde sur les dispositions de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle qui énonce :

« Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.
(…)
La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée.
(…)
La déchéance prend effet à la date d’expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu. ».

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence fit droit à la demande de la société Hermès Parfums et prononça donc la déchéance des droits de la société concurrente sur sa marque antérieure « Voyager », à dater du cinquième anniversaire de son inexploitation et au plus tard à la date de l’assignation délivrée par la société Hermès Parfums.

La société déchue de ses droits formait un pourvoi en faisant grief à la Cour d’appel de ne pas avoir suffisamment tenu compte des circonstances factuelles qui selon elle établissaient un usage sérieux de sa marque ; ce dernier justifiant d’actes de diffusion et de présentation de ses produits marqués auprès des membres de son réseau de distributeurs indépendants.

Par ailleurs, selon elle, les nombreux actes préparatoires au lancement de sa gamme de produits « Voyager » antérieurs au 15 juillet 2008, date de la demande de déchéance, et la diffusion des produits marqués à partir de son réseau de distributeurs privilégiés qui s’en est suivie à compter du mois de septembre 2008 devait être prise en compte pour échapper à la déchéance de ses droits.

Sans surprise, la Cour de cassation rejette le pourvoi au motif que « tous les actes d’usage de la marque « Voyager » étaient postérieurs à la demande de déchéance et que les actes antérieurs à celle-ci ne constituaient que des actes préparatoires à cet usage effectués au sein de la société concurrente ou auprès de prestataires de services ou de sous-traitants » et qu’ils étaient donc insusceptibles de caractériser un usage sérieux de la marque « Voyager » au sens de l’article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle.

En effet, cet article énonce de manière très claire que « l’usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la période de cinq ans visée au premier alinéa du présent article n’y fait pas obstacle s’il a été entrepris dans les trois mois précédant la demande de déchéance et après que le propriétaire a eu connaissance de l’éventualité de cette demande ».

En l’espèce, il n’est donc pas surprenant que la Cour de Cassation confirme la position adoptée par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence qui constate l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure à la demande en déchéance formulée par la société Hermès Parfums.

Cet arrêt rappelle l’importance de se constituer des dossiers de preuve d’usage de ses marques car en cas de contentieux et de demande judiciaire en déchéance de ses droits, toute reprise d’usage tardive sera insuffisante pour échapper à la déchéance de ses droits.

Déposer une marque, c’est bien, l’exploiter sérieusement, c’est encore mieux.

A propos de Cass. Com., 19 mars 2013, Pourvoi n°12-14626

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