Face à une demande d’enregistrement en fraude de droits antérieurs sur une marque, de bonne ou de mauvaise foi, le titulaire des dits droits peut obtenir le transfert de ce dépôt. C’est l’action en revendication.
Cette qualification (bonne ou mauvaise foi) est essentielle puisqu’il en découle le délai de prescription pour agir : 3 ans dans le cadre d’un dépôt de bonne foi, absence de ce délai de 3 ans en cas de dépôt de mauvaise foi.
Dans cet arrêt du 14 décembre 2010, la question qui se posait était justement de savoir si, en l’espèce la mauvaise foi du déposant d’une marque tridimensionnelle internationale identique, pouvait être ou pas.
Le dépôt n’était pas de mauvaise foi
En l’espèce la Cour de cassation a considéré que le dépôt n’était pas de mauvaise foi et partant que l’action de la société I. était prescrite en statuant en ces termes:
« Mais attendu qu’ayant relevé que non seulement la société T. avait expliqué à la société I. qu’elle avait procédé au dépôt litigieux pour empêcher un tiers de lancer sur le marché une copie du produit, mais encore qu’elle avait proposé de lui céder les droits sur la marque internationale contre le seul remboursement des frais d’enregistrement et estimé que la mauvaise foi ne pouvait se déduire de la seule existence de relations commerciales entre les parties, la cour d’appel, qui s’est placée au moment du dépôt et qui a pris en compte l’ensemble des circonstances de l’espèce, a légalement justifié sa décision ; »
Il ressort de cette décision que :
- d’une part, l’intention du demandeur s’apprécie au moment du dépôt,
- et que d’autre part, si la mauvaise foi peut se déduire des relations d’affaires entre les parties, l’ensemble du contexte et circonstances autour du dépôt demeurent essentielles et sources d’indices importants.
Justement, revenons sur les circonstances de cette affaire : la société T. est distributeur exclusif en Italie, du désodorisant pour réfrigérateur, déposé à titre de marque tridimensionnelle et objet du litige, et semble avoir procédé au dépôt litigieux, pour faire obstacle à un tiers, mais visiblement sans en avertir la société I. ni juste avant de procéder au dépôt, ni juste après.
Si le dépôt est bien frauduleux (effectué en connaissance des droits d’un tiers), alors il est de bonne foi ! Difficile de penser que la société T. avait l’intention de nuire, ou de tirer profit de ce dépôt dans la mesure où, elle était déjà distributeur exclusif des produits, qu’elle avait procéder au dépôt pour gêner un tiers, et qu’elle semble même avoir proposé à la société I. de lui céder les droits, contre le seul remboursement des frais d’enregistrement.
En tout état de cause, puisque la qualification d’un dépôt de bonne ou de mauvaise foi relève de l’appréciation des juges, la prudence exige de toujours agir promptement !
Sources :
Arrêt de la cour de Cassation commerciale du 14 décembre 2010, n° 09-16755 sur le site legifrance.gouv.fr ;
Action en revendication : point de départ de la preuve de la mauvaise foi (D. Fenasse) sur le site lemondedudroit.fr ;
Arrêt de la Cour de Cassation Commerciale du 25 avril 2006, n°04-15641 sur le site legifrance.gouv.fr ;