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Le pouvoir modérateur du juge en matière de relations B to B

contrat entre professionnel

Dans un arrêt du 23 mars 2010 la Cour d’Appel de Renne rappelle que les magistrats disposent du pouvoir de remettre en cause les clauses contractuelles stipulées entre les parties, y compris lorsqu’il s’agit d’un contrat passé entre professionnels.

En  l’espèce, les parties avaient prévu dans le cadre d’un contrat de collaboration de fixer un certain nombre de règles destinées à régir leur partenariat commercial et notamment les règles en matière de promotion des ventes et de développement de la marque. Des conditions générales de vente ont été également prévues, imposées par le fournisseur et qui doivent s’appliquer à chaque contrat de vente de marchandise. Ces conditions générales figuraient au verso des factures émises.

La Cour est saisie des questions suivantes :

Les Conditions Générale de vente du fournisseur adossées aux factures et non signées sont-elles opposables aux distributeurs ?

La Cour répond par l’affirmative en précisant que ces conditions non contestées sont opposables, peu importe qu’elles aient été signées ou non.

Quel est le régime des intérêts retard en cas de non paiement des factures ?

Visant directement les dispositions de l’article L.441-6 8, la Cour rappelle que les intérêts de retard pour non paiement de factures  sont dus de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats.

La clause pénale contractuellement fixée entre des professionnels peut-elle être revue ?

Faisant application de son pouvoir modérateur conféré par l’article 1152 du Code civil, la Cour apprécie souverainement la clause pénale prévue dans le contrat. Cette appréciation in concreto s’effectue en l’espèce au regard de l’économie générale du contrat mais également eu égard à la fin imminente des relations des parties et de la résistance opposée à une remise sur le chiffre d’affaire. Les magistrats considèrent au vu de ces éléments la clause manifestement excessive et décident de la baisser à1000 euros au lieu de 5691,93 euros.

En quoi la rupture des relations est-elle brutale ?

En application de l’article L442-6 5 du Code de commerce, engagera sa responsabilité le fournisseur qui aura rompu brutalement, c’est-à-dire sans respecter un préavis raisonnable, une relation commerciale établie. A l’instar du pouvoir modérateur conféré aux magistrats en application de l’article 1152 alinéa 2 du Code civil, l’article L442-6 du Code de commerce soumet à l’appréciation des Tribunaux le caractère brutal des ruptures. Il convient à cet égard de relever les différents critères sur lesquels s’appuie la Cour pour entrer en voie de condamnation.

Ainsi s’agissant du préavis, peu importe pour la Cour qu’un préavis de 6 mois ait été contractuellement prévu. Il est décidé de doubler ce préavis au regard des éléments suivants : 13 années de relation commerciale établie (durée de la relation), la part du chiffre d’affaires réalisée entre les partenaires (état de dépendance économique), la difficulté de trouver de nouveaux fournisseurs en produit de notoriété équivalente à ceux de la marque ou encore le caractère saisonnier des produits et la rotation des stocks (difficulté de reconversion).

Sur la base de ces constatations, la Cour considère que l’absence de respect d’un préavis de rupture raisonnable caractérise une rupture brutale des relations devant donner lieu à indemnisation à raison des pertes de marge brute durant le préavis non effectué.

Conclusion

Cette décision est l’occasion de rappeler que la décision de rupture des relations entre professionnels ne doit pas être prise à la légère. Celui qui décide de rompre ne peut en effet se contenter de suivre une procédure pourtant contractuellement fixée. L’augmentation constante des contentieux nés de ruptures brutales au visa de l’article L.442-6 du Code de commerce vient le confirmer. Ainsi, pour déterminer le préavis raisonnable qu’il conviendra de respecter pour se séparer de son partenaire devra-t-on apprécier la durée des relations, l’état de dépendance économique ou encore les difficultés de reconversion de l’autre partie. Or, tout est question d’espèce et d’appréciation avec parfois des données non connues de l’auteur de la rupture. Ceci explique donc peut-être cela…

Source :

Arrêt de la Cour d’Appel de Rennes du 23 Mars 2010.

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