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Droit des contrats et des obligations : réforme et enjeux

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Par Marie d’Auvergne et LEGALFAB
L’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats et des obligations, publiée le 11 février au Journal Officiel, semble (enfin) répondre aux fortes attentes qui existaient depuis de nombreuses années autour de la nécessité de rénover certaines dispositions du Code civil inchangées depuis 1804.
Le Gouvernement rappelle dans son compte-rendu du Conseil des ministres du 10 février dernier que l’accessibilité et l’intelligibilité du droit sont des objectifs à valeur constitutionnelle. L’intention affichée est donc claire : tous les justiciables doivent pouvoir comprendre l’ensemble des étapes de la vie d’un contrat, de sa formation à son exécution, en s’aidant le cas échéant d’un outil qui semblait jusque-là réservé aux seuls juristes, le Code civil.
Les principales innovations portent sur la volonté de trouver un équilibre entre les obligations des parties et la possibilité de recourir au juge en cas de remise en cause de cet équilibre. Pour ce faire, il était nécessaire de cibler les besoins pratiques des particuliers et des professionnels. Deux axes majeurs peuvent donc être dégagés : les dispositions à destination des particuliers et celles à destination des acteurs économiques.
 

  1. Les dispositions à destination des particuliers

Dans un souci de protection des parties les plus faibles, qui bien souvent se trouvent être des particuliers, l’ordonnance introduit dans le Code civil les quelques dispositions suivantes :

  • Ainsi, la notion de bonne foi est consacrée à tous les stades de la vie d’un contrat, et non plus seulement au moment de l’exécution du contrat.
  • L’abus de l’état de dépendance d’une partie sera désormais sanctionné par la nullité du contrat.
  • L’introduction d’un dispositif de sanctions des clauses abusives a dans un premier temps suscité des inquiétudes, le Code de la consommation et le Code de commerce répondant déjà à cet objectif. Néanmoins, le nouvel article 1771 trouvera sans nul doute sa place dans l’arsenal législatif puisque le mécanisme de sanction ne s’appliquera que pour les contrats d’adhésion, c’est-à-dire ceux pour lesquels aucune négociation n’a eu lieu.
  • Un devoir général d’information est également codifié à l’article 1112-1 du Code civil et il est d’ordre public. Il prévoit que la partie qui détient une information d’une importance déterminante doit donc la communiquer à l’autre partie, et considère comme ayant une importance déterminante « les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties ».
  • De nombreuses solutions jurisprudentielles ont par ailleurs enfin été consacrées dans le Code civil, les rendant ainsi plus claires et plus accessibles : à titre d’exemple, la violence économique figurant à l’article 1143, la réticence dolosive à l’article 1137 ou encore l’introduction de dispositions relatives à la conclusion du contrat aux articles 1112 et suivants, qui étaient jusque-là uniquement prétoriennes.

 

  1. Les dispositions à destination des acteurs économiques

Le but est d’éviter un recours trop systématique au contentieux. Ainsi, une partie qui constaterait une inexécution dans le contrat pourra décider d’y mettre fin sans nécessairement passer par une décision de justice, mais simplement en le notifiant à son cocontractant.
Par ailleurs, les règles relatives à l’inexécution contractuelle, qui étaient jusqu’ici dispersées à divers endroits dans le Code civil, sont désormais regroupées aux articles 1217 et suivants. Cinq sanctions sont ainsi codifiées dans cinq sous-sections différentes : exception d’inexécution, exécution forcée en nature, réduction du prix face à une prestation imparfaite, résolution du contrat, réparation du préjudice résultant de l’inexécution du contrat.
D’autres dispositions ont également été introduites dans le Code civil :

  • Diverses dispositions permettant de simplifier certains mécanismes : par exemple, les entreprises pourront céder des contrats et des dettes, les formalités exigées en cas de cession de créances seront allégées pour permettre leur circulation rapide et obtenir des financements.
  • L’instauration d’actions interrogatoires permettant de sécuriser un peu plus le contrat : ainsi, un cocontractant qui craint que son contrat ne soit pas valable pourra interpeller son partenaire sur cette difficulté.
  • Un des mécanismes les plus attendus fait également son entrée à l’article 1195. Il s’agit de la théorie de la révision pour imprévision : les parties à un contrat que des bouleversements économiques imprévisibles rendraient économiquement intenable pour l’une d’elles seront invitées à renégocier ce contrat et pourront, en cas d’échec de la négociation, saisir le juge pour rééquilibrer le contrat ou y mettre fin. Toutefois, les parties peuvent décider d’assumer le risque que le contrat devienne économiquement intenable et de ne pas le renégocier si un tel risque survenait.

 
La réforme concerne aussi l’ère numérique
En matière de preuve, le nouvel article 1379 traitera de la force probante des copies, au regard notamment des nouvelles technologies. Une copie fiable, en particulier lorsqu’elle est réalisée sur support électronique, aura la même force probante que l’original. Ainsi, dans le cadre d’un litige, une partie ne sera obligée de produire la version papier d’un document que si cette dernière subsiste. Cela permet d’inciter les entreprises à se doter d’un archivage électronique, d’encourager la dématérialisation et d’inscrire le droit français dans l’ère numérique.
D’autres notions éparses sont introduites par la réforme : le Code encadrera entre autres les conditions générales et leurs relations avec des conditions particulières aux articles 1119 et suivants. Il apportera également la définition de certains contrats courant dans le domaine des affaires, comme le contrat d’adhésion (article 1110) et le contrat cadre (article 1111).
Les maîtres-mots semblent donc être efficacité, protection, clarté et simplicité. En effet, selon la plupart des professionnels du droit, aussi bien praticiens que théoriciens, cette réforme permettra de rendre le droit français des contrats plus clair et plus attractif, à la fois aux yeux des justiciables mais également en-dehors de nos frontières.
L’ordonnance, qui entrera en vigueur le 1er octobre prochain, avait été rédigée à l’aide des contributions apportées par la consultation en ligne mise à la disposition du public entre le 28 février et le 30 avril 2015. Au vu du succès de cette initiative, le Gouvernement a décidé de la renouveler lors de la prochaine réforme qui concernera le droit de la responsabilité civile, autre grand chantier dans la rénovation du droit français.
 
Pour tout renseignement complémentaire, n’hésitez pas à contacter le Cabinet HAAS Avocats.

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