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Noms de domaine évocateurs : une protection amoindrie

nom de domaine

A propos de CA Paris, 18 septembre 2013

Dans cette affaire, la société Autoreflex.com, spécialisée dans la publication d’annonces de vente et d’achat de véhicules automobiles, a engagé une action judiciaire en contrefaçon de marque, atteinte à sa dénomination sociale, son nom commercial et son nom de domaine contre un particulier qui a réservé et exploité le nom de domaine reflexauto.fr pour développer une activité de courtage automobile.

En effet, la société Autoreflex.com faisait valoir qu’elle exploitait le site www.autoreflex.com depuis 1999 et qu’elle était propriétaire de plusieurs marques verbales et semi-figuratives Autoreflex.com dûment enregistrées et exploitées pour désigner différents services relevant des classes 35, 38, 41 et 42.

La société Autoreflex.com fut néanmoins déboutée de ses demandes d’indemnisation au motif qu’elle ne rapporte pas la preuve de la titularité des droits sur la marque enregistrée au nom de la société Corb’s (son ancienne dénomination sociale), et ne justifiait ni d’une atteinte aux noms de domaine, à la dénomination sociale ou au nom commercial, ni d’une concurrence déloyale, faute ou pratique commerciale trompeuse, ni d’un préjudice.

En cause d’appel, la Cour constate finalement que la société Autoreflex.com justifie de sa propriété des marques fondant son action, puisque ces marques lui ont toujours appartenu et que le changement de dénomination sociale (au demeurant inscrit au Registre National des Marques (RNM)) n’a nullement affecté cette propriété.

Afin de déterminer si l’usage du nom de domaine « reflexauto.fr » constitue ou non une contrefaçon des marques antérieures, « autoreflex.com », la Cour apprécie si un risque de confusion peut être généré par la comparaison globale des signes en vigueur.

Conformément à la jurisprudence constante en la matière, elle tient compte de tous les critères pertinents de l’espèce et notamment de la comparaison des produits et services. Or, en l’espèce, elle constate que les services de courtage automobile proposés par la personne poursuivie sur le site www.reflexauto.fr ne sont pas similaires aux services visés par l’enregistrement des marques fondant l’action en contrefaçon ; les seuls services visant le domaine de l’automobile étant l’organisation et la conduite de colloques, conférence et congrès notamment sur la distribution automobile, l’édition de revues sur l’automobile et l’édition d’un journal de petites annonces de vente de voitures.

En outre, la Cour s’attache à comparer l’impression globale qui se dégage des deux signes, en tenant compte du caractère banalement incitatif du mot « reflex » renvoyant à l’évidence au réflexe et du terme « auto », générique pour désigner les automobiles, de sorte que les deux signes en cause renvoient à la même idée de réflexe en matière de recherche concernant le domaine de l’automobile sur internet.

La Cour en déduit que compte tenu de la banalité intrinsèque des expressions ‘Autoreflex.com’ et ‘Reflexauto.fr’, « la clientèle ne saurait être induite en erreur compte tenu de ces appellations usuelles, pour des transmissions accessibles sur le réseau internet concernant des voitures, les services proposés s’avérant en fait trop peu similaires ou connexes pour que le consommateur moyennement avisé des produits désignés par la marque antérieure soit réellement amené à croire à un lien entre cette marque et le nom de domaine incriminé, utilisé sans la moindre équivoque exclusivement pour une activité spécifique de courtage en ligne, ne relevant pas de l’enregistrement opposé ».

Cet arrêt s’insère dans la lignée de jurisprudences anciennes telles qui refusent de reconnaître un risque de confusion entre des signes très proches dès lors que ceux-ci ont un caractère distinctif très faible (cf. CA Paris, 18 octobre 2000, Ann. Propr. Ind. 2002, p.43 : « les marques « Info Car » et « Carinfo » ne bénéficiant pas d’un degré de distinctivité très élevé, toutes deux évoquant les informations dans le domaine de l’automobile, ne permettent pas au consommateur de leur attribuer la même origine. Par conséquent, le risque de confusion entre ces marques n’existe pas » ou TGI Reims, 8 mars 1994, PIBD 1994, III, 384 : « les droits de la société « Phot’Express » se limitent à l’expression « Phot’express » stricto sensu »)

La cour rejette l’argument de l’atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial et aux noms de domaine invoqué par la société Autoreflex.com en tenant le même raisonnement visant à considérer que les services de courtage en ligne consistant à reprendre des véhicules et le cas échéant à proposer l’achat du véhicule en recherchant le nouveau véhicule souhaité proposés sur le site www.reflexauto.fr se distinguent de l’activité d’édition d’annonces de ventes ou d’achats où l’internaute achète ou vend directement un véhicule à un annonceur, tels que proposés par la société Autoreflex.com.

Cet arrêt illustre le choix toujours délicat qu’il convient de faire entre un nom de domaine générique ou évocateur des produits ou services proposés en ligne, qui offre des atouts indéniables en terme de marketing et de référencement, et des noms de domaine au plus fort caractère distinctif intrinsèque, beaucoup plus facilement protégeables contre l’usage de noms de domaine similaires par des tiers pour désigner des produits ou services similaires.

La constitution, la gestion et la protection d’un portefeuille de noms de domaine doivent donc être pensées dans le cadre d’une politique globale de protection de ses actifs incorporels en trouvant un bon équilibre entre les intérêts marketing et les intérêts juridiques.

Pour en savoir davantage sur les problématiques liées à la sélection de votre nom de domaine, consultez notre article Choix d’un nom de domaine générique: pas (forcément) judicieux juridiquement.

Consultez également nos conseils en matière de gestion de vos noms de domaine, des actifs incorporels à valoriser comme les autres : Vos marques et noms de domaine ont de la valeur : activez-les au bilan !

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