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La cession de fonds de commerce électronique: nouvel enjeu de notre ère

fonds de commerce électronique haas avocats

Par Frédéric PICARD, Sybille ELLEBOODE-MERLIER et Camille MERLIER

Au premier semestre 2017, le commerce électronique, véritable « or noir » du secteur de la vente, a généré un chiffre d’affaires de 20 milliards d’euros et a connu une forte croissance de 14,2 % par rapport au premier semestre 2016. Ainsi, la cession de fonds de commerce électronique est devenue un véritable enjeu à l’ère de la transition numérique et du commerce en ligne.  

La cession d’un fonds de commerce ne désigne désormais plus uniquement une universalité de biens corporels (le mobilier commercial, le matériel, l’outillage, …) et incorporels (droit au bail, nom commercial, enseigne, clientèle, …) traditionnels mais peut également désigner la cession d’un fonds de commerce immatériel, tel un site internet d’e-commerce avec les actifs immatériels qui lui sont rattachés.

La jurisprudence a rapidement évolué face à l’expansion sans précédent du numérique. A ce titre, la Cour d’appel de Paris a reconnu dès 2005 que l’exploitant d’une « messagerie conviviale » sur Minitel possédait une clientèle, élément incorporel constitutif du fonds de commerce.

Pour une cession, il est important d’identifier les éléments constitutifs d’un fonds de commerce électronique puisque la qualification juridique de la cession emporte l’application d’un régime spécifique qui diffère de celui applicable à la cession d’un ou plusieurs actif(s) isolé(s).

Ainsi, constituent notamment le fonds de commerce électronique :

  • Le site internet, en lui-même, comprenant :
  • les éléments constitutifs ou les éléments d’exploitation du site en lui-même dont le cédant est propriétaire (nom de domaine, adresses électroniques rattachées, charte graphique, structure, programme du logiciels d’exploitation du site, référencement naturel, réseaux sociaux …) et
  • la clientèle lui étant attachée (fichiers clients, fichiers prospects, bases de données) ;
  • Les éventuelles marques attachées à l’exploitation du fonds de commerce électronique ;
  • Le nom commercial et l’enseigne.

Une fois la qualification juridique de cession de fonds de commerce électronique établie, l’acheteur (cessionnaire) et le vendeur (cédant) doivent être particulièrement attentifs à minima sur  trois points spécifiques à ce type de cession :

1) Les droits de propriété intellectuelle

Images, textes, sons, chartes graphique, solutions logicielles, sont autant d’éléments constituant le site internet susceptibles de bénéficier de la protection accordée par le droit d’auteur. Aussi, il s’agira d’être prudent en la matière, puisque la cession de fonds de commerce électronique n’entraîne pas de facto la transmission des droits de propriété intellectuelle au cessionnaire. La transmission de ces droits requiert des clauses spécifiques respectant le formalisme des articles L.131-3 et L.131-4 du Code de la propriété intellectuelle relatifs aux modalités de cession et aux conditions d’exploitation des œuvres. Rappelons que le non-respect de ce formalisme est sanctionné par la nullité de la cession des droits d’auteur.

Il faudra en outre s’assurer que le cédant soit bien le titulaire des droits d’auteur des œuvres cédées, telles la charte graphique ou encore la solution logicielle. Procéder à de telles vérifications quant à la titularité des éléments cédés permet de se prémunir contre toute action en contrefaçon qui pourrait être intentée à l’encontre du cessionnaire par les porteurs de droits concurrents. Ainsi, il conviendra d’inclure une clause de garantie de jouissance paisible à la cession de fonds de commerce électronique.

2) Les spécificités informatiques

Un certain nombre d’éléments du site internet et de contrats liés sont nécessaires à la bonne exploitation du fonds de commerce électronique et doivent être impérativement transmis :

  • Le nom de domaine

Le nom de domaine est une caractéristique importante du fonds de commerce électronique et joue un rôle fondamental.

C’est pourquoi il est important de s’assurer au préalable que la cession du nom de domaine ne porte pas atteinte aux droits de propriété intellectuelle d’un tiers. Le cédant doit être titulaire du nom de domaine cédé, et doit inclure dans la cession les adresses électroniques liées et les éventuelles extensions du nom de domaine. Ici encore l’insertion d’une clause de garantie de jouissance paisible pourra prémunir le cessionnaire en cas d’action judiciaire de la part d’un tiers titulaire de droits concurrents.

  • Le contrat d’hébergement

Sur ce point, une mise en garde s’impose puisque en cas de cession le contrat d’hébergement n’est en principe pas transmis sauf clause contraire. En théorie, une clause spécifique devra être prévue afin d’autoriser la transmission du contrat d’hébergement avec l’accord écrit de l’hébergeur. En pratique, un nouveau contrat sera bien souvent souscrit par le cessionnaire auprès de l’hébergeur.

  • Le référencement, les comptes détenus auprès des services d’analyse d’audience (Google Analytics, …) et les réseaux sociaux

Il s’agit d’éléments clés de la cession de fonds de commerce électronique puisque leur usage permettra d’obtenir une certaine visibilité et ainsi d’attirer la clientèle. Leur transmissibilité devra être analysée au cas par cas. Ainsi, il est fondamental de prévoir précisément les modalités de transmission (mots de passe, identifiants…) dans le contrat de cession du fonds de commerce électronique.

3) Les fichiers de données à caractère personnel et la clientèle

L’existence, longtemps débattue d’une « e-clientèle » propre au fonds de commerce électronique est désormais reconnue. La clientèle, élément essentiel du fonds de commerce, doit nécessairement être cédée avec le fonds. Il faut néanmoins garder à l’esprit que la cession du fichier-client n’est pas suffisante à remplir les conditions de validité de la cession de fonds de commerce électronique.

En outre, le transfert du fichier-clients doit se faire dans le respect de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, « Informatique et liberté ». Si le transfert n’est pas déclaré à la CNIL, le fichier client sera considéré comme étant hors commerce.

Le fichier-prospects peut également être cédé. Le cessionnaire doit alors s’assurer que la collecte des données personnelles a été loyalement effectuée conformément aux dispositions de l’article L.34-5 du Code des postes et communications électroniques.

4) Cas spécifique des contrats

En principe, les contrats sont exclus du fonds de commerce quand bien même ils seraient des éléments déterminants de la réussite de l’entreprise (contrats d’affiliation, contrats de places marchandes…). Bien qu’ils ne soient pas transmissibles de plein droit, il demeure possible de les inclure au contrat de cession.

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Avec plus de la moitié des PME françaises présentes sur Internet selon le Baromètre 2013 du e-commerce des petites entreprises, les opérations de cession de fonds de commerce ne vont cesser de croître dans les prochaines années.

Aussi, si la cession d’un élément d’actif précis est relativement simple, la cession de plusieurs éléments composant le fonds de commerce électronique est une opération juridique bien plus délicate et complexe. En outre, la qualification de cession de fonds de commerce électronique est rigoureuse et une erreur peut entraîner la nullité-même de l’opération.

Les Cabinets ASEMLEX et HAAS Avocats unissent leurs expertises complémentaires en Droit des affaires, ainsi qu’en Droit du digital et de la propriété intellectuelle dans l’objectif commun de vous accompagner lors de vos opérations de cession et d’acquisition.

 

 

 

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